Le journaliste Français Benjamin Roger a récemment été expulsé du Mali. Le pays a suspendu son programme d’accréditation des journalistes (Benjamin Roger/Twitter)

Le Mali expulse le journaliste français Benjamin Roger et suspend le processus d’accréditation des médias

New York, le 11 février 2022 – Les autorités maliennes devraient veiller à ce que les obstacles bureaucratiques n’empêchent pas les journalistes internationaux d’entrer dans le pays et d’y couvrir librement l’actualité, a déclaré vendredi le Comité pour la protection des journalistes.

Le Lundi 7 février, des policiers de la capitale Bamako ont arrêté le Français Benjamin Roger, journaliste de l’organe de presse privé Jeune Afrique, arrivé dans le pays quelques heures plus tôt sur un vol en provenance de la France, selon les informations, un communiqué de Jeune Afrique, et Roger, qui s’est entretenu avec le CPJ par téléphone.

Les policiers l’ont emmené à la Brigade d’investigation judiciaire, où il a été transféré à la police des frontières qui a révoqué son visa d’entrée et l’a forcé à quitter le pays, selon ces sources. Les autorités frontalières ont déclaré qu’il n’avait pas l’accréditation requise pour exercer son métier de journaliste dans le pays.

Harbert Traoré, conseiller technique auprès du ministère de la Communication, a déclaré au CPJ lors d’entretiens téléphoniques jeudi et vendredi qu’à l’heure actuelle, les processus d’accréditation des journalistes avaient été suspendus, mais que les journalistes accrédités qui se trouvaient déjà au Mali pouvaient continuer à travailler. Deux représentants du gouvernement ont invité le CPJ à s’adresser à Traoré pour tout commentaire.

« Il n’y a pas de renouvellement d’accréditation et il n’y a pas d’accréditation. Tout est suspendu momentanément », a-t-il déclaré, ajoutant que les accréditations sont interrompues le temps que les autorités « modernisent » le système d’accréditation. Il a déclaré que la suspension était en vigueur avant l’arrivée de Roger dans le pays, mais a refusé de dire quand elle avait commencé ou quand elle se terminerait.

« Les autorités maliennes devraient agir rapidement pour veiller à ce que les journalistes étrangers puissent travailler librement et sans tracasseries administratives », a déclaré Angela Quintal, coordinatrice du programme Afrique du CPJ. « Il est inacceptable qu’un pays refuse simplement d’accorder des accréditations à la presse au nom de la mise à jour de ses processus bureaucratiques. »

Traoré a déclaré au CPJ que les journalistes étrangers doivent avoir une accréditation pour travailler dans le pays et obtenir des visas, mais n’a pas répondu directement lorsqu’on lui a demandé quelles étaient les sanctions en cas de travail sans accréditation. Il a qualifié la situation actuelle de « petite pause » pour les journalistes étrangers au Mali. Auparavant, fin janvier, les autorités avaient annoncé leur intention de modifier le processus d’accréditation du pays, selon les médias.

Traoré a déclaré que les autorités étaient en train de créer une nouvelle plateforme qui permettra aux journalistes de demander des accréditations en ligne, et que celle-ci devrait être finalisée dans les prochains jours. Il a ajouté qu’il se concentrait sur les questions d’accréditation et ne savait pas qui était responsable de l’expulsion de Roger.

Roger a déclaré au CPJ que les policiers l’avaient interrogé à la Brigade d’investigation judiciaire pendant environ 10 minutes au sujet de son travail, et qu’il leur avait dit qu’il couvrait la situation politique dans le pays. Roger a récemment couvert l’actualité politique en Afrique de l’Ouest.

Les tensions entre le Mali et la France se sont accentuées ces dernières semaines ; lundi, le Premier ministre Choguel Kokalla Maiga a accusé la France de promouvoir l’insécurité et la division dans le pays, selon les médias.

Un journaliste qui couvrait auparavant le Mali pour un organe de presse étranger, et qui a souhaité rester anonyme pour des raisons professionnelles, a déclaré jeudi au CPJ que l’obtention d’un permis de travail dans le pays était relativement facile avant.

Le journaliste a déclaré qu’il prévoit de se rendre à nouveau dans le pays pour couvrir l’actualité, mais que l’incertitude actuelle l’avait fait réfléchir à deux fois. « On essaye d’obtenir une accréditation mais pour le moment, on n’y parvient pas », a déclaré le journaliste.