Dakar, le 1er novembre 2022 — Les autorités ivoiriennes doivent cesser de harceler le journaliste Barthélémy Téhin pour ses reportages sur la corruption, lever immédiatement son contrôle judiciaire qui restreint ses déplacements, et veiller à ce que les représentants du gouvernement respectent la loi sur la presse qui dépénalise les délits de presse, a déclaré mardi le Comité pour la protection des journalistes.
Le 5 octobre, un juge de la capitale, Abidjan, a placé Téhin, rédacteur en chef du quotidien privé Le Panafricain, sous contrôle judiciaire suite à la publication d’articles sur une supposée corruption impliquant un agent des douanes, selon un communiqué du Syndicat national des professionnels de la presse de Côte d’Ivoire (SYNAPPCI) et Téhin qui s’est entretenu avec le CPJ par téléphone. L’ordonnance du juge faisait suite à une plainte déposée par l’administration des douanes contre Téhin, qui a été officiellement inculpé de diffamation.
Téhin a déclaré qu’il avait été placé sous contrôle judiciaire pour une période indéterminée en attendant la suite de l’enquête du juge. Le contrôle judiciaire stipule que Téhin doit comparaître tous les 15 jours devant le juge, et que le journaliste doit obtenir l’autorisation du juge s’il veut quitter Abidjan.
« Les autorités ivoiriennes doivent immédiatement lever le contrôle judiciaire imposé à Barthélémy Téhin, rédacteur en chef du journal Le Panafricain, et lui permettre de travailler librement et sans restriction », a déclaré Angela Quintal, coordinatrice du programme Afrique du CPJ, à New York. « La lettre et l’esprit de la loi dépénalisant les délits de presse doivent être respectés en ne permettant pas le harcèlement et la censure apparente par des moyens dérobés. »
Téhin a déclaré que son placement sous contrôle judiciaire est lié à la publication le 28 mars de 10 articles qu’il a écrits, dénonçant le détournement de fonds publics et la corruption au sein des douanes ivoiriennes impliquant un haut agent des douanes.
Téhin a déclaré au CPJ qu’il avait contacté l’administration douanière pour obtenir des commentaires, mais qu’après deux semaines sans réponse, il avait publié les articles qui faisaient état de ses tentatives d’obtenir des commentaires.
Téhin a ajouté que depuis qu’il a commencé à publier les articles, l’Autorité nationale de la presse, à savoir l’instance de régulation indépendante, ne lui a pas donné un seul avertissement et qu’il pense faire son travail dans le respect de la loi.
En vertu de l’article 89 de la loi sur la presse du pays, les personnes reconnues coupables de diffamation ne sont pas passibles de détention ou d’emprisonnement pour « des infractions commises par voie de presse ou tout autre moyen de publication, sous réserve de toute autre disposition légale applicable ». La loi sur la presse prévoit une amende de un à trois millions de francs CFA (1 500 et 4 500 dollars). Mais les autorités ont ignoré cette loi dans d’autres affaires récentes.
Le CPJ a envoyé un courriel aux douanes ivoiriennes pour obtenir des commentaires, mais n’a obtenu aucune réponse.