New York, le 17 juin 2020 — Les autorités de Djibouti doivent cesser de harceler les journalistes travaillant pour le radiodiffuseur La Voix de Djibouti et s’assurer que la presse puisse couvrir les affaires d’intérêt public sans intimidation, a déclaré aujourd’hui le Comité pour la protection des journalistes.
Le 5 juin, la police a arrêté dans la ville d’Ali Sabieh, dans le sud, Massim Nour Abar, journaliste à la station de radio et site Internet d’actualité basé à Paris, alors qu’il se préparait à couvrir des manifestations dans la ville, selon son avocat, Zakaria Abdillahi, qui s’est entretenu au téléphone avec le CPJ.
Des manifestations ont eu lieu partout dans Djibouti au début juin à la suite de la détention et des mauvais traitements qu’aurait subis un pilote de l’armée de l’air, selon des articles de presse.
Encore le 5 juin, Osman Yonis Bogoreh, un autre journaliste travaillant à La Voix de Djibouti, s’est caché lorsque la police est arrivée sur la manifestation qu’il couvrait dans la capitale, Djibouti-ville, a-t-il déclaré au CPJ.
Le 7 juin, la police à Djibouti a arrêté Mohamed Ibrahim Waiss, un autre journaliste travaillant pour le radiodiffuseur et qui est aussi correspondant auprès du groupe de défense de la liberté de la presse Reporters sans frontières, alors qu’il couvrait les manifestations, selon Zakaria et des reportages du diffuseur et du groupe de défense de la presse.
Les autorités ont libéré Abar le 8 juin et Waiss le 10 juin, tous deux sans inculpation, selon Zakaria et Reporters sans frontières. Bogoreh a indiqué au CPJ qu’il restait toujours caché, à ce jour.
« Les autorités à Djibouti doivent mettre fin aux arrestations et à l’intimidation visant les journalistes travaillant pour La Voix de Djibouti », a déclaré Angela Quintal, coordinatrice du programme Afrique du CPJ. « Osman Yonis Bogoreh doit pouvoir travailler sans crainte, et les responsables de l’arrestation et de la détention arbitraires de Kassim Nour Abar et de Mohamed Ibrahim Waiss doivent être amenés à répondre de leurs actes. »
La Voix de Djibouti a été fondée by Daher Ahmed Farah, chef du parti d’opposition Mouvement pour le renouveau démocratique, connu pour sa critique du gouvernement de Djibouti, selon les recherches du CPJ. D’après Zakaria, Waiss se trouvait au bureau personnel de Djama Houssein Robleh, secrétaire général du parti, lorsqu’il a été arrêté.
La police a confisqué l’ordinateur de Robleh, que Waiss utilisait pour déposer son rapportage, a ainsi que le téléphone et l’ordinateur d’Abar, lors de leur arrestation, et ne les a pas rendus, selon Zakaria et Reporters sans frontières.
Bogoreh a précisé au CPJ que les policiers sont arrivés au domicile de sa mère le 6 juin et ont demandé où il se trouvait, sans toutefois expliquer pourquoi ils le recherchaient.
Mahamoud Djama, le rédacteur en chef et directeur de La Voix de Djibouti, a indiqué au CPJ par téléphone que beaucoup des correspondants de ce média faisaient l’objet d’une surveillance du gouvernement.
Zakaria a informé le CPJ que les arrestations et détentions des journalistes étaient illégales parce qu’aucun d’entre eux n’avait été amené devant le juge dans les 48 heures après leur arrestation, tel que le dispose l’article 64 du Code de procédure pénale de Djibouti.
Le CPJ a appelé le ministère de l’Intérieur et le ministère de la Justice pour leur demander des commentaires, mais sans obtenir de réponse. Le CPJ a appelé la police de Djibouti le 10 juin. Un représentant a demandé qu’on le rappelle une heure plus tard. Lorsque le CPJ a rappelé à plusieurs reprises, la ligne se coupait avant que le représentant ne puisse commenter.
Le 24 octobre 2019, des agents de police ont arrêté Bogoreh à Djibouti-ville, l’ont interrogé sur son travail pour La Voix de Djibouti et l’ont battu avant de l’emmener dans une zone en dehors de la ville où ils l’ont attaché nu à un arbre et l’ont filmé pendant qu’ils le battaient à nouveau, selon Bogoreh et un rapport de la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme, un groupe de défense des droits de l’homme.
Des agents de police l’ont libéré sans inculpation le 26 octobre, mais des agents de la Sécurité nationale l’ont de nouveau arrêté le 30 octobre et l’ont détenu jusqu’au 4 novembre avant de le libérer sans inculpation, selon Bogoreh et le rapport susmentionné.