Fifty years ago, development journalism helped to silence dissenting voices: One had to rally to the fathers of the nation for the sake of national unity. Accordingly, the legacy of these 50 years of Francophone media in Africa is freedom of the press and opinion. Journalists prod the elites, who are allergic to criticism, and require that they account for their handling of power and assume responsibility in the face of the various scandals they cause. Recently in Burkina Faso for instance, a government minister had to resign after the print media revealed his extramarital affair with a married woman. This was unthinkable a few years ago.
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When I was a child in Abidjan, Ivory Coast, and as far as I can remember, I was always fascinated by journalists at work covering wars and disasters, investigating and uncovering the exploits and misdeeds of intrinsically good or bad people. I also held the highest esteem for journalists who, for me, were well-rounded and savvy in prodding their guests. For me, journalism was the ideal job and it still is.
However, in 1998, while I was a first-year student in journalism at the University of Ouagadougou, the murder of Norbert Zongo opened my eyes and made me realize that the job was actually full of pitfalls. Then, I realized that the struggle for press freedom and respect for rules upholding the pillars of sustainable democracy required solidarity, vigilance and commitment, especially from journalists and civil society organizations. In fact, students at the University of Ouagadougou were the first to denounce the murder of Zongo and to take to the streets to protest.
I also realized that a journalist never works in vain. The Zongo tragedy inspired at least half a dozen investigative news outlets to emerge and Blaise Compaore‘s regime seemed to realize it could no longer kill journalists. Notwithstanding this recognition, the administration’s actions against the media have become much more subtle. Journalists are often summoned to military police headquarters, remanded in custody, targeted with libel lawsuits, and sentenced to pay fines. Such a situation demands a redefinition of struggle strategies and calls on journalists to be more alert.
In this struggle to safeguard free expression and obtain more freedom, the African Francophone press has abandoned its companion in the struggle of the 1990s–the people. Following the euphoria of the wind of democratic openness in the 1990s, much of the Francophone press teamed up with political and economic elites. Such associations led to a disconnection with the people. Nowadays, almost all the media is covering nearly the same issues on politicians and other economic figures. As a consequence and general finding we are witnessing institutional journalism consisting in covering seminars, conferences, praising high-ranking people, whereas more than 90 percent of Burkina Faso’s population lives in the rural areas.
However, there is an opportunity for members of the news media to move closer to the people. The Internet, much criticized by newspaper owners because they are losing their already undersubscribed readership, seems to be one of the solutions. Unfortunately, there are very few blogger journalists in Francophone Africa and particularly in Burkina Faso.
It is sometimes difficult for journalists to meet their goals because of the existence of inadequate regulations. In most Francophone African countries, the media is still calling for the decriminalization of press offenses, a less repressive press law and access to sources, particularly administrative documents. In 2007, I was “denied” access to a report on the partial assessment of the meningitis epidemic that was then prevailing in the country by one of the departments of the Ministry of Health. After several unsuccessful attempts, a search on the Internet and a few clicks on the site of an international organization allowed me to have access to the report.
Thanks to the press, the ideology of transparency and accountability is beginning to force the elites to adapt to the public scene. Thus, the press is gaining status and power. Of course, we have to do “capacity-building” as we commonly say today, but this is surely the biggest benefit.
Ramata Soré has been a journalist with L’Evénement, a bimonthly published in Ouagadougou, since 2001. She is the recipient of several awards for her reporting and has been running a blogsince 2005. The is the last in a CPJ Blog series celebrating the 50th anniversary of the end of colonial rule in Francophone Africa.
En Afrique, la percée de la liberté de presse passe en ligne
Il y a 50 ans, le journalisme de développement avait permis de taire les voix discordantes : il fallait se rallier aux Pères de la nation, construction de l’unité nationale oblige. De ce fait, l’héritage des 50 ans pour la presse francophone s’avère la liberté de presse et d’opinion. Ainsi les journalistes titillent, exigent que les élites, allergiques à la critique, rendent compte de leur gestion du pouvoir et assument leur responsabilité face aux différents scandales dont ils sont les auteurs. Récemment au Burkina Faso, après que la presse écrite eut a révélé la liaison extraconjugale d’un ministre avec une femme mariée, ce dernier a du démissionner. Chose impensable il y a quelques années de cela.
Enfant à Abidjan en Cote d’Ivoire, lors du journal télévisé, j’avais toujours été fascinée par les journalistes sous le feu des actions, couvrant les guerres, les catastrophes, investiguant et mettant au jour les faits et méfaits d’individus intrinsèquement bons ou mauvais. Egalement, j’avais de la considération pour les journalistes qui pour moi, étaient des personnes qui avaient une grande culture générale et avaient la capacité de titiller leurs invités. Pour moi, c’était le métier idéal et c’est toujours le métier idéal.
Mais, en 1998, encore étudiante en 1ère année de journalisme à l’université de Ouagadougou, l’assassinat de Norbert Zongo m’a ouvert les yeux et fait savoir qu’en réalité le métier est plein d’embuches. C’est en ce moment que j’ai compris que le combat pour la liberté de la presse et le respect des règles fondant et soutenant la démocratie étaient un combat, exigeant de la solidarité, de la vigilance et surtout de l’engagement venant principalement des journalistes et de la société civile. D’ailleurs, après la tragédie de Sapouy, les étudiants de l’université de Ouagadougou avaient été les premiers à dénoncer l’assassinat de Zongo, à descendre dans les rues, à manifester…
Avec cet assassinat, j‘ai aussi compris que le journaliste ne travaillait jamais en vain. Zongo avait fait des émules. Au moins une demi-dizaine de journaux d’investigation ont vu le jour. Et le régime de Blaise Compaoré semble avoir pris conscience qu’il ne pouvait plus tuer de journalistes. Nonobstant cette prise de conscience, ses actions contre le monde de la presse sont devenues beaucoup plus subtiles. Des journalistes sont souvent convoqués à la gendarmerie, gardés à vue, « victimes de procès pour diffamation » et condamnés à payer des amendes. Cela appelle une redéfinition des stratégies de lutte et commande aux journalistes d’être plus alertes et plus entreprenants.
Dans cette lutte pour l’expression et plus de liberté, la presse francophone africaine a délaissé son compagnon de lutte des années 90 : le peuple. Après l’euphorie du vent de l’ouverture démocratique dans les années 90, une grande partie de la presse francophone s’est maintenant plus acoquinée avec les élites politiques et économiques. Cette accointance a provoqué une déconnexion avec le peuple. De nos jours, la quasi-totalité des medias couvrent presque les mêmes sujets sur les politiques et autres acteurs du monde économique. Conséquence et constat d’ensemble: on assiste à un journalisme institutionnel fait de couverture de séminaires, de conférences, louant les gens d’en haut alors que plus de 90% de la population burkinabè vit dans les campagnes.
Toutefois, l’espoir existe pour les femmes et hommes de presse de se rapprocher encore du peuple. L’internet, tant décrié par les propriétaires de journaux du fait qu’ils perdent un lectorat déjà bas abonné à la version papier, semble l’une des solutions. Malheureusement, les journalistes bloggeurs se comptent sur le bout des doigts en Afrique francophone et plus particulièrement au Burkina Faso : moins d’une dizaine.
La réalisation de leurs objectifs s’avère quelque fois difficile pour les journalistes du fait de l’existence de textes inadéquats. Dans la plupart des pays francophones d’Afrique, le monde des medias plaide encore pour une dépénalisation des délits de presse, un code de l’information moins répressif et surtout l’accès aux sources notamment les documents administratifs. En 2007, je me suis vue « refuser » par l’un des départements du ministère de la Santé burkinabè l’accès à un rapport sur le bilan partiel sur l’épidémie de méningite qui sévissait dans le pays. Après plusieurs tentatives infructueuses, une recherche sur internet et quelques clics sur le site d’une organisation internationale m’ont permis d’avoir accès à ce fameux rapport.
Grace à la presse, l’idéologie de la transparence et de la prise de responsabilité commence à obliger les élites à s’adapter à la scène publique. Ainsi, la presse est en train d’acquérir un statut, un pouvoir. Bien sûr, il faut « renforcer les capacités » comme on dit aujourd’hui, mais c’est sûrement le plus gros des bénéfices.
Ramata Soré est depuis 2001 journaliste à L’Evénement (un bimensuel paraissant à Ouagadougou). Rrécipiendaire de plusieurs prix pour se reportages, elle anime un blog depuis 2005.