Les journalistes Christian Bofaya (à gauche) et Patrick Lola sont détenus sans chef d’inculpation, en République démocratique du Congo depuis le 10 janvier 2022. (Crédit prélevé)

Deux journalistes congolais détenus depuis 5 mois après avoir couvert une manifestation

Kinshasa, le 17 mai 2022Les autorités de la République démocratique du Congo doivent garantir la libération immédiate des journalistes Patrick Lola et Christian Bofaya, détenus de manière arbitraire et sans chef d’inculpation depuis cinq mois à la prison centrale de Mbandaka, la capitale de la province de l’Équateur, a déclaré mardi le Comité pour la protection des journalistes. 

Le 10 janvier, Bobo Boloko Bolumbu, gouverneur de la province de l’Équateur, a ordonné l’arrestation de Lola, journaliste indépendante, et de Bofaya, journaliste à la radio privée E Radio, selon l’avocat des journalistes, Junior Bonoke, qui s’est entretenu par téléphone avec le CPJ.

Selon les médias, Lola et Bofaya couvraient une manifestation publique organisée par trois députés provinciaux dont l’élection avait été invalidée par l’assemblée provinciale en octobre 2021. La police a arrêté les journalistes et les trois députés pour avoir prétendument troublé l’ordre public. Selon Ouragan.cd, le maire de Mbandaka, Didi Edada, a déclaré que les autorités locales n’avaient pas autorisé la manifestation.

Bonoke a déclaré au CPJ que les arrestations et les détentions subséquentes des journalistes étaient motivées par des considérations politiques parce que les manifestations avaient été organisées par des députés qui critiquaient la gestion de Bolumbu et appelaient à sa destitution en tant que gouverneur. 

« Il est scandaleux que plus de cinq mois après leur arrestation, les journalistes Patrick Lola et Christian Bofaya continuent d’être détenus sans procès pour avoir simplement fait leur travail et couvert une manifestation d’importance majeure contre le gouverneur », a déclaré Angela Quintal, coordinatrice du programme Afrique du CPJ, à New York. « Les autorités congolaises devraient veiller à ce que Lola et Bofaya soient immédiatement libérés sans aucune charge ni autres actes de harcèlement. »

Christian Bofaya (Crédit prélevé)

Après leur arrestation, les journalistes ont été escortés par Bolumbu jusqu’au siège de la police à Mbandaka, a déclaré Bonoke au CPJ. Après quelques heures, les deux journalistes et les trois députés arrêtés ont été transférés au bureau du procureur militaire, où ils ont passé deux nuits en détention. 

Le 12 janvier, les journalistes et les députés ont été conduits au tribunal de paix de Mbandaka. Les députés ont refusé de reconnaître l’autorité de la cour faisant valoir qu’en tant qu’élus, ils devaient être jugés par cour supérieure, a déclaré Bonoke au CPJ. Les cinq personnes arrêtées ont toutes été renvoyées en prison, a déclaré Bonoke, ajoutant qu’elles ont été escortées par le gouverneur pendant tout ce temps. 

Le 16 janvier, les journalistes et les députés ont comparu devant la Haute Cour de Mbandaka, mais les députés ont contesté l’autorité de cette cour en la matière, affirmant qu’ils avaient déjà saisi un autre tribunal, et ont fait valoir que les cas des journalistes devaient être entendus en même temps que les leurs, a déclaré Bonoke au CPJ. 

Patrick Lola (Crédit prélevé)

Esther Nkonge, présidente de l’Union nationale de la presse congolaise (UNPC)/Équateur, a déclaré au CPJ par téléphone qu’elle s’efforçait d’obtenir la libération des journalistes et avait rencontré Bolumbu et son conseiller. 

Bolumbu a déclaré à l’UNPC que le dossier des journalistes se trouvait devant la Cour de cassation nationale à Kinshasa, la capitale, et qu’ils devaient donc attendre que cette juridiction se prononce sur cette affaire. Depuis que l’affaire a été renvoyée devant la Cour de cassation, il n’y a eu aucun développement et les journalistes restent en prison, selon Nkonge.

Le CPJ a téléphoné à Bolumbu, à Pélagie Ebeka, chef de cabinet adjoint du ministère de la Justice, au porte-parole de la Présidence Kasongo Mwema, et à la porte-parole adjointe de la Présidence, Tina Salama, pour obtenir des commentaires, mais aucun des appels n’a reçu de réponse. 

Le 11 mai, le chef de cabinet adjoint du gouverneur, Rossy Bolekwa, a confirmé par téléphone que les deux journalistes étaient toujours en prison, mais s’est refusé à tout autre commentaire, déclarant que l’affaire était devant les tribunaux. 

Joint par téléphone, Taylor Ngazi, vice-gouverneur de la province de l’Équateur, a déclaré qu’il était à Kinshasa lorsque les journalistes ont été arrêtés mais qu’il n’a pas suivi l’évolution de ce dossier.

En novembre 2021, Chilassy Bofumbo, rédacteur en chef de Radio Télévision Sarah, a été arrêté à Mbandaka alors qu’il couvrait une manifestation. Bofumbo attend son procès dans la même prison que Lola et Bofaya. Bofumbo a été inculpé de mépris de l’autorité, d’imputations préjudiciables, d’insultes publiques, de rébellion, d’incitation à la haine et d’incitation à la désobéissance civile. S’il est reconnu coupable, il encourt jusqu’à 12 ans de prison. Le CPJ exhorte les autorités à abandonner les poursuites et à libérer le journaliste.