Amsterdam, 27 janvier 2022 – une nouvelle enquête de A Safer World For The Truth sur la mort de la journaliste centrafricaine Elisabeth Blanche Olofio révèle la vulnérabilité des journalistes locaux enquêtant sur les conflits, cible de violences, voire de graves exactions.
“Telling The Story: Remembering Elisabeth Blanche Olofio (Raconter l’histoire : se souvenir d’Elisabeth Blanche Olofio” est le troisième volet d’une série d’investigation menée dans le cadre de la campagne A Safer World For The Truth (Un monde plus sûr pour la vérité). Ce projet initié par les principales organisations de défense de la liberté de la presse, Free Press Unlimited (FPU), Reporters sans frontières (RSF) et le Comité pour la protection des journalistes (CPJ) a pour objectif d’enquêter sur des meurtres et met les gouvernements face à leurs responsabilités par le biais du Tribunal des peuples contre les assassinats de journalistes.
Elisabeth, qui travaillait pour Radio Be Oko (« Un cœur »), révélait la corruption locale et les violations des droits humains en République centrafricaine (RCA). A l’époque des faits, en 2013, elle donnait des informations cruciales à sa communauté sur l’avancée des rebelles. Son travail lui a valu d’être battue, torturée et violée par des rebelles de la Seleka dans sa ville natale de Bambari, le 5 janvier 2013.
Souffrant d’un important traumatisme physique et psychologique, Elisabeth a succombé à ses blessures en juin 2014. Elle avait 34 ans.
Le rapport de A Safer World For The Truth met en avant le rôle significatif de journalistes locaux comme Elisabeth pour informer leurs communautés et les publics internationaux sur les conflits. Dans certains cas, ce sont les seules sources d’information dans une région. Et c’est pour cela que les journalistes sont visés par les belligérants, qui s’efforcent de les réduire au silence, notamment par des violences sexuelles ou sexistes exercées sur les femmes reporters.
L’enquête révèle des suspects potentiels responsables de la torture, du viol et de la mort d’Elisabeth, la manière dont ils ont échappé à toute enquête, ainsi que la souffrance endurée par la journaliste à la suite de son agression.
Le rapport insiste sur la nécessité, pour le procureur de la Cour pénale spéciale, d’ouvrir immédiatement une enquête sur les crimes commis contre des journalistes par toutes les parties en guerre en République centrafricaine depuis 2012, en conformité avec le Plan d’action de l’ONU sur la sécurité des journalistes et la question de l’impunité (2012).
Il se poursuit en montrant comment l’évacuation d’Elisabeth vers un environnement sûr, hors du pays, a échoué en raison de problèmes avec ses documents officiels.
Après 18 mois de souffrances, Elisabeth a succombé à ses blessures en juin 2014. Le rapport recommande que les Etats accordent la priorité et des visas d’urgence aux journalistes locaux en danger, ainsi que des visas à la famille proche, afin de prévenir des assassinats et d’aider les journalistes à échapper à d’éventuelles attaques, comme ce fut le cas pour Elisabeth. Des visas d’urgence pourraient être fournis aux journalistes qui, dans le monde, sont en danger de mort et éligibles à ce plan de soutien.
Pour Jens Kiesheyer, cheffe d’équipe Afrique & Est, Free Press Unlimited (FPU):
« Elisabeth était une journaliste courageuse dont la mort aurait pu être évitée. Nous exhortons les Etats à ouvrir leurs frontières à celles et ceux qui risquent leur vie chaque jour pour nous informer».
« L’attaque perpétrée contre Elisabeth Blanche Olofio révèle les dangers auxquels sont exposés les journalistes en République centrafricaine. De véritables enquêtes sur sa mort et l’assassinat d’autres journalistes dans le pays sont essentielles pour combattre l’impunité régnante. L’impunité qui entoure l’assassinat de journalistes ne fait qu’accentuer les risques déjà très élevés de travailler sur les troubles et les conflits armés »,déclare Angela Quintal, coordinatrice de programme Afrique, Comité pour la protection des journalistes (CPJ).
« L’histoire d’Elisabeth résonne de manière forte et claire : nous devons faire plus pour protéger les journalistes. Dans ce cas précis, travailler ensemble pour mettre un terme à l’impunité, en militant pour davantage de protection pour les journalistes, est essentiel. Des Etats accordant des visas d’urgence pour le petit groupe de journalistes qui en a un besoin urgent serait une première étape clé dans la bonne direction », estime pour sa partChristophe Deloire, secrétaire général de Reporters sans frontières (RSF).
Pour prendre connaissance des enquêtes précédentes et des recommandations, rendez-vous sur https://www.saferworldforthetruth.com/fr/investigations