New York, le 13 juillet, 2007—Dans cette nation de l’Afrique de l’Ouest riche en uranium, un journal privé a été fermé et plusieurs autres mis en garde alors que le gouvernement tente de censurer la médiatisation des attaques meurtrières d’un groupe armé de rebelles touaregs au nord up pays, selon des bulletins d’information et des journalistes sur place.
Le 29 juin, le Conseil Supérieur de la Communication (CSC) du Niger a suspendu pour trois mois le bimensuel Aïr Info, unique journal de la ville centrale d’Agadez, à environ 740 km au nord-est de la capitale Niamey, selon les mêmes sources. Dans un fax adressé au journal, le conseil a accusé Aïr Info d’avoir publié des articles « portant atteinte au moral des troupes », a déclaré le directeur Ibrahim Manzo Diallo au CPJ. La subvention annuelle de 1,4 millions de francs CFA, versée par le gouvernement au journal, a elle aussi été suspendue.
Ce jeudi, Diallo a été interrogé dans un commissariat pendant 45 minutes à propos de documents administratifs, après qu’il ait relancé cette semaine le journal sous la nouvelle designation d’Info Aïr, ont affirmé des journalistes locaux au CPJ.
Selon les recherches du CPJ, des articles critiquant les forces de sécurité gouvernementales après deux attaques rebelles dans la zone d’Agadez en juin, seraient à l’origine de la décision contre Aïr Info. Le journal a par ailleurs appelé à la démission du chef de l’armée Moumouni Boureïma, après qu’une attaque rebelle contre un avant-poste militaire dans une zone désertique ait laissé 15 soldats morts et 72 pris en otages. Au moins 33 troupes du gouvernement ont été tuées dans des attaques similaires depuis février, selon Reuters.
Le CSC a également mis en garde les hebdomadaires privés de Niamey Le Démocrate, L’Evénement, Libération, et Opinion, pour avoir imprimé des informations « directement prises des sites web des rebelles, sans aucun traitement professionnel du contenu », a déclaré Mamane Mamadou, membre du CSC, au CPJ.
« Le Niger a l’habitude de réagir à la critique en réduisant le messager au silence », a déclaré Joël Simon, le directeur exécutif du CPJ. « La fermeture d’Aïr Info est une grossière tentative de censure de l’information sur les rebelles touaregs agissant au nord du pays. Nous appelons le gouvernement à retirer immédiatement l’interdiction du journal et à permettre à la presse de rendre compte librement de la crise, en accord avec les principes démocratiques ancrés dans la constitution du Niger. »
Les reportages de la radio n’ont apparemment pas été touchés par les actions du conseil, mais les journaux se sont abstenus cette semaine de réimprimer l’intégralité des communiqués rebelles, a affirmé au CPJ le directeur de Libération Boubacar Diallo.
Les autorités ont continué la pratique de la censure et des lois criminelles de la diffamation pour faire taire la presse privée, en réponse aux accusations de corruption ou de mauvaise gestion des fonds publics. L’année dernière, les autorités ont emprisonné pour plus de trois mois deux journalistes de l’hebdomadaire privé Le Républicain, suite à un éditorial critiquant l’ancien premier ministre Hama Amadou. Amadou a été destitué en Mars, suite à un scandale de corruption dans le financement de l’enseignement primaire, rapporté par Le Républicain l’année dernière.
Le Niger n’a pas encore tenu la promesse de 2004 du Président Mamadou Tandja, renouvelée en janvier, d’interdire les peines de prison pour les délits de presse.