Un policier regarde des manifestants bloquer des routes et lancer des pierres à Conakry, en Guinée, le 28 juillet 2022, après que les autorités ont empêché les partisans de la coalition de l’opposition, le Front national pour défense de la Constitution (FNDC), de se rassembler dans les rues pour une marche pacifique. Le vendredi 23 septembre, la Haute Autorité de la Communication (HAC), le régulateur des médias en Guinée, a ordonné la suspension pour un mois de l’émission de radio « Africa 2015 » de Nostalgie Guinée et de trois de ses animateurs à la suite d’une émission diffusée le 22 septembre dans laquelle un responsable du FNDC est intervenu par téléphone. (AFP/Cellou Binani)

Le régulateur guinéen ordonne la suspension pour 1 mois de 3 journalistes et de l’émission de radio « Africa 2015 »

Dakar, le 30 septembre 2022 — Les autorités guinéennes doivent lever la suspension de l’émission « Afrique 2015 » de la radio Nostalgie Guinée et de trois de ses journalistes, et veiller à ce que la presse puisse couvrir librement les sujets d’intérêt public sans faire l’objet de sanctions, a déclaré vendredi le Comité pour la protection des journalistes.

Le vendredi 23 septembre, la Haute Autorité de la communication (HAC), le régulateur des médias en Guinée, a ordonné la suspension pour un mois de l’émission diffusée par la station de radio privée Nostalgie Guinée et de trois des animateurs de l’émission – Mamadou Mathé Bah, Minkailou Barry et Kalil Camara, selon les médias locaux qui publient une copie de l’ordonnance de suspension, et un journaliste local qui s’est entretenu par téléphone avec le CPJ sous couvert d’anonymat par crainte de représailles. 

Le régulateur affirme que dans l’émission diffusée le 22 septembre, Sékou Koundouno, responsable d’une coalition de partis politiques d’opposition et de groupes de la société civile appelée Front national pour la défense de la Constitution (FNDC), est intervenu par téléphone et a tenu des propos « incitant à la révolte populaire » et a proféré des                  « injures publiques », selon une copie de l’ordonnance de suspension. Toujours selon l’ordonnance, Bah, Barry et Camara « n’ont pas fait preuve de professionnalisme ».  

Koundouno a déclaré au CPJ par téléphone que lors de l’émission, il avait appelé les Guinéens à « se mobiliser pour un retour à l’ordre constitutionnel ». Koundouno a déclaré qu’il avait lancé cet appel à l’action en réponse aux critiques formulées par le gouvernement militaire de la Guinée contre le président de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) pour s’être opposé au maintien du régime militaire dans le pays. Le CPJ n’a pas été en mesure de visionner l’émission qui n’est pas disponible en ligne, et sa demande pour en obtenir une copie auprès de la station de radio est restée sans réponse. 

« Les autorités guinéennes doivent annuler la suspension de l’émission de radio « Africa 2015 » de Nostalgie Guinée et de trois de ses animateurs – Mamadou Mathé Bah, Minkailou Barry et Kalil Camara », a déclaré Muthoki Mumo, représentante du CPJ en Afrique subsaharienne, à Nairobi. « Ces suspensions témoignent des ambitions des autorités guinéennes de censurer les voix critiques à l’égard du gouvernement militaire et envoient un message glaçant aux journalistes dans le pays. » 

Chaikou Baldé, président du groupe local de défense de la liberté de la presse Alliance des médias pour les droits de l’homme (AMDH), et le journaliste local qui a demandé de garder l’anonymat ont déclaré au CPJ par téléphone que le vendredi 23 septembre, 10 minutes avant le début de l’émission de ce jour-là, les animateurs ont appris leur suspension dans les médias publics. Baldé a ajouté que les animateurs suspendus n’avaient pas été informés directement ou invités à répondre aux préoccupations du régulateur avant la décision. Le régulateur offre généralement à un journaliste la possibilité de répondre avant d’ordonner une suspension, a déclaré Baldé.

En outre, le régulateur a interdit aux animateurs suspendus de s’exprimer dans les médias locaux sur quelque sujet que ce soit pendant un mois jusqu’au 22 octobre, selon Baldé et le journaliste anonyme. L’émission compte cinq animateurs, mais deux d’entre eux étaient absents lors de la diffusion et n’ont pas été suspendus, ont-ils déclaré.

Après avoir envoyé un courriel à Boubacar Yacine Diallo, président de l’organe de régulation, le CPJ a reçu une réponse indiquant que Diallo était disponible pour une interview, mais son téléphone était éteint. Le CPJ a tenté de relancer le président en lui envoyant un autre courriel contenant des questions, mais en vain.