Kinshasa, le 9 août 2022 – Les autorités congolaises doivent mener une enquête approfondie sur les récentes attaques contre les journalistes Daniel Aloterembi et Fify Kibwana et traduire les responsables en justice, a déclaré mardi le Comité pour la protection des journalistes.
Le 28 juillet, devant le tribunal de Kinshasa, la capitale, un groupe de policiers a attaqué et saisi deux téléphones appartenant à Aloterembi, journaliste du site d’information privé Mediacongo.net, et a menacé de l’arrêter, selon le journaliste qui s’est entretenu avec le CPJ par téléphone, et un reportage de son organe de presse qui appartient à Congo-press.com (MCP).
Aloterembi couvrait une audience à laquelle participait l’opposant Jean-Marc Kabund lorsque des policiers l’ont poursuivi et frappé à coups de poing, l’ont arrêté pendant environ cinq minutes dans la rue, puis l’ont laissé partir après s’être emparés de ses téléphones et de l’équivalent de 3 dollars en espèces, selon ces sources.
Par ailleurs, le 2 août, à Kinshasa, des hommes non identifiés ont pris à parti Kibwana, journaliste de la chaîne de télévision privée Verts Pâturages, alors qu’elle interviewait des personnes à l’extérieur du même tribunal lors d’une autre audience à laquelle participait Kabund, selon la journaliste qui s’est entretenue avec le CPJ par téléphone, une vidéo de l’attaque que le CPJ a pu examiner, et un reportage du groupe local de défense de la liberté de la presse Observatoire africain de la liberté de la presse (OLPA).
Ces hommes – qui se sont identifiés comme des partisans de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS), le parti politique du président Félix Tshisekedi – l’ont poussée, ont tiré son écharpe et l’ont menacée verbalement pour avoir interviewé des militants qui soutenaient Kabund et critiquaient Tshisekedi, a déclaré la journaliste au CPJ.
« Les autorités congolaises doivent mener une enquête approfondie sur les récentes attaques contre les journalistes Daniel Aloterembi et Fify Kibwana et traduire les responsables en justice », a déclaré Muthoki Mumo, représentant du CPJ pour l’Afrique subsaharienne, à Nairobi. « L’attaque de journalistes par des forces de sécurité ou des militants politiques envoie un message glaçant aux journalistes qui cherchent à couvrir des événements d’importance majeure. Ces attaques font partie d’une tendance alarmante en RDC. »
La police a tiré des grenades lacrymogènes sur des journalistes et des partisans de Kabund alors qu’Aloterembi tournait un reportage au tribunal, mais le journaliste a déclaré au CPJ qu’il n’avait pas été blessé par le gaz.
Aloterembi a dit au CPJ qu’il portait une veste de presse sur laquelle figurait le logo Mediacongo.net et qu’il avait sa carte de presse autour du cou. Après avoir été arrêté par les policiers, Aloterembi a dit à la police qu’il était journaliste et qu’il couvrait l’audience et leur a montré sa carte de presse. Les policiers ont répondu qu’ils savaient qu’il était journaliste, mais que s’il refusait de leur remettre ses affaires personnelles, « nous vous emmènerons dans la jeep [de la police] » .
Aloterembi a déclaré que les coups de poing des policiers n’avaient pas entraîné de blessures graves, et qu’au 9 août, ses téléphones et son argent ne lui avaient toujours pas été rendus.
Sylvano Kasongo, le commissaire de police de Kinshasa, a déclaré au CPJ par téléphone qu’une enquête était en cours pour identifier les policiers responsables de l’attaque contre Aloterembi.
Selon Kibwana, les hommes qui l’ont attaquée l’ont suivie alors qu’elle cherchait refuge dans sa voiture et ce n’est que grâce à l’aide de son caméraman qu’elle a pu s’échapper et se cacher dans une église voisine. Elle a déclaré ne pas avoir été blessée lors de l’attaque.
Le CPJ a appelé à plusieurs reprises le Secrétaire général de l’UDPS, Augustin Kabuya, pour solliciter ses commentaires mais il n’a pas répondu.