Kinshasa, le 19 mars 2024 — Le Comité pour la protection des journalistes (CPJ) salue la libération par la République démocratique du Congo du journaliste Stanis Bujakera Tshiamala, mais s’inquiète de la condamnation de ce dernier à six mois de prison et à une amende de 1 million de francs congolais (400 USD), et du maintien en détention du journaliste Blaise Mabala, détenu depuis décembre.
Après plus de six mois de prison, Bujakera a été libéré mardi, ont déclaré au CPJ Ndikulu Yana et Charles Mushizi, deux des avocats de Bujakera, via une application de messagerie. Et d’ajouter qu’ils prévoyaient de faire appel de la condamnation et de la peine.
« Si le fait que le journaliste Stanis Bujakera ne soit plus derrière les barreaux est bonne nouvelle, sa condamnation et sa peine sont alarmantes car elles visent à justifier les mois qu’il a passés en détention et envoient un message glaçant à l’ensemble de la communauté des médias. Son cas est un coup dur pour la liberté de la presse en RDC », a déclaré Angela Quintal, responsable du programme Afrique du CPJ. « Les autorités congolaises doivent prendre des mesures urgentes pour améliorer les conditions de liberté de la presse, notamment en libérant Blaise Mabala, emprisonné depuis décembre 2023, en abandonnant les poursuites engagées contre lui, et en réformant les lois du pays pour s’assurer que le journalisme n’est pas criminalisé. »
Bujakera est citoyen congolais et résident permanent des États-Unis. Il a travaillé comme correspondant pour l’agence de presse privée Jeune Afrique et Reuters, et a également été directeur de publication adjoint du site d’information Actualite.cd basé en RDC.
La police congolaise a arrêté Bujakera à Kinshasa, la capitale de la RDC, le 8 septembre 2023, et les autorités l’ont mis en examen pour propagation de fausses rumeurs, falsification, usage de faux et de distribution de faux documents en vertu de l’application combinée du code pénal de la RDC, d’un nouveau code numérique et de la loi sur la presse. Les accusations découlent d’un article, que Bujakera n’a pas écrit, publié le 31 août par Jeune Afrique sur l’implication éventuelle du renseignement militaire dans le meurtre d’un homme politique de l’opposition.
Lors d’une audience le 8 mars, le rapport d’un expert technique mandaté par le tribunal a suggéré que Bujakera n’était pas la source principale d’un document cité dans l’article de Jeune Afrique que les services de renseignement de la RDC ont qualifié de faux. Au cours de la même audience, le procureur a requis la condamnation de Bujakera à une peine de 20 ans d’emprisonnement et à une amende d’un million de francs congolais (361 USD). Mais lundi, le juge l’a condamné à six mois de prison, qu’il a déjà purgés, et à l’amende du montant requis, qui, selon les déclarations de Yana au CPJ, avait été payée avant sa libération.
Dans les heures qui ont précédé la libération de Bujakera, le procureur a fait appel de la sentence, avant de se désister, selon Yana.
Dans une autre affaire, Mabala, coordinateur de la radio privée Même moral FM et correspondant du site d’information privé okapinews.net, arrêté le 29 décembre, est en détention provisoire à la prison centrale de Makala à Kinshasa. Il est accusé de diffamation et d’outrage à l’encontre de Rita Bola, gouverneure de la province du Maï Ndombe, suite à une émission diffusée en octobre au cours de laquelle des auditeurs ont appelé en direct et ont critiqué la femme politique.