La journaliste nigérienne Samira Sabou a été mise en examen le 11 octobre 2023 pour avoir diffusé de données de nature à troubler l'ordre public et entretenu des "intelligences avec une puissance étrangère." (Photo avec l’aimable autorisation d’Abdoul Kader Nouhou)

La journaliste nigérienne Samira Sabou mise en examen pour trahison et cybercriminalité

Dakar, Sénégal, le 12 octobre 2023—Le Comité pour la Protection des Journalistes a appelé les autorités nigériennes à abandonner toutes les charges retenues contre la journaliste Samira Sabou et à lui permettre de faire son travail en toute liberté. 

“Les autorités nigériennes doivent abandonner rapidement toutes les poursuites judiciaires contre la journaliste Samira Sabou, lui rendre son téléphone et veiller à ce que les journalistes dans le pays puissent travailler sans craindre d’être arrêtés ou poursuivis en raison de leur travail,” a déclaré Angela Quintal, coordinatrice du programme Afrique du CPJ, depuis New York. “Sabou a fait l’objet de poursuites sous le précédent gouvernement nigérien, et il est alarmant de voir les nouvelles autorités militaires poursuivre leurs efforts pour la harceler et l’emprisonner. C’est un message qui fait froid dans le dos pour tous les journalistes au Niger.”

Le mercredi 11 octobre, un tribunal de première instance de la capitale, Niamey, a provisoirement libéré Sabou, qui publie régulièrement des informations et des commentaires sur sa page Facebook, après 11 jours de détention, selon son avocat, Ould Salem Saïd, et un membre de sa famille qui s’est entretenu avec le CPJ sous couvert d’anonymat, pour des raisons de sécurité. Les autorités ont conservé le téléphone de Sabou et ont ordonné à la journaliste d’informer le juge de toute intention de voyager une semaine à l’avance. 

Sabou est mise en examen pour avoir diffusé des données de nature à troubler l’ordre public, ce qui est passible d’une peine allant jusqu’à trois ans d’emprisonnement et d’une amende pouvant atteindre 5 millions de francs CFA (8 080 dollars), et pour avoir entretenu des “intelligences avec une puissance étrangère,” un chef d’accusation de trahison puni par la peine de mort, selon l’article 31 de la loi sur la cybercriminalité et l’article 63 du code pénal

Les chefs d’accusation sont liés au fait que Sabou s’est entretenue avec des diplomates étrangers, à l’utilisation d’une application de suivi de vols d’avions appelée Flightradar24, et à un message publié sur Facebook le 29 septembre dans lequel elle a dévoilé un document détaillant des affectations de personnel militaire nigérien, selon le membre de la famille. 

Le 30 septembre, quatre hommes en civil ont arrêté Sabou au domicile de sa mère. Bien que la police judiciaire de Niamey nie avoir arrêté Sabou, elle a appelé son avocat le 7 octobre pour l’informer que la journaliste était détenue par leur service, a déclaré Saïd au CPJ.

En juillet, l’armée nigérienne a pris le contrôle du gouvernement lors d’un coup d’État qui a renversé son président démocratiquement élu. Depuis, le CPJ et d’autres groupes de défense de la liberté de la presse ont fait part de leurs préoccupations concernant la sécurité des journalistes dans le pays.