Des policiers sont aperçus dans le nord-est de la République démocratique du Congo le 10 mai 2021. La police de la RDC a récemment détenu trois journalistes pendant plus d’une semaine dans une affaire d’insultes. (AFP/Alexis Huguet)

Les autorités de la RDC détiennent 3 journalistes pendant plus d’une semaine dans une affaire d’insultes

Dakar, 10 mai 2022 — Les autorités congolaises devraient immédiatement abandonner toute procédure judiciaire à l’encontre des journalistes Albert Muhila, Dieu Agba et Patrick Gbondo, et réformer les lois du pays pour veiller à ce que les journalistes ne soient pas emprisonnés dans le cadre de leur travail, a annoncé mardi le Comité pour la protection des journalistes.

Le 22 avril, des agents du Groupe d’intervention mobile de la police nationale congolaise ont arrêté les trois journalistes, qui travaillent comme reporters et présentateurs pour la station privée Radio Mwana Mboka, au siège de la station dans la ville de Bumba, dans le nord-ouest du pays, selon un article du groupe local de défense de la liberté de la presse OLPA et du chef des programmes et responsable des ressources humaines de Radio Mwana Mboka, José Dossa, qui s’est entretenu avec le CPJ par téléphone.

Les journalistes ont été libérés de la prison centrale de Bumba le 4 mai après avoir chacun versé 180 000 francs congolais (90 dollars) au procureur de Bumba, Fidèle Atafu, selon Agba, qui s’est entretenu avec le CPJ par téléphone. Il a déclaré qu’Atafu leur avait dit que chaque journaliste devait lui verser 180 000 francs supplémentaires et qu’il les appellerait dans un délai de cinq jours, mais selon Agba, les journalistes n’ont toujours pas été contactés au sujet de cette somme d’argent supplémentaire.

La police a déclaré que les journalistes avaient été arrêtés en lien avec une plainte pour injures publiques à la suite d’une émission du 20 avril à laquelle ils avaient tous participé, a déclaré Agba au CPJ. Selon lui, la police n’a pas identifié l’auteur de cette plainte. Lors de la diffusion de l’émission, les invités ont critiqué la capacité de gouverner et l’éligibilité du politicien Jean-Pierre Lihau Ebua, selon Agba, Dossa et l’OLPA. Le CPJ n’a pas été en mesure d’examiner de manière indépendante le contenu cette émission.

« Les autorités congolaises devraient immédiatement abandonner toute procédure judiciaire à l’encontre des journalistes Albert Muhila, Dieu Agba et Patrick Gbondo et veiller à ce qu’ils puissent couvrir les questions d’intérêt public sans crainte d’être arrêtés », a déclaré Angela Quintal, coordinatrice du programme Afrique du CPJ, à New York. « Avec les élections en RDC prévues pour l’année prochaine, l’accès à l’information et aux actualités politiques est essentiel pour que les populations congolaises puissent prendre des décisions éclairées concernant l’avenir de leur pays. »

Agba a déclaré au CPJ le 9 mai qu’il n’avait reçu aucune nouvelle information sur l’affaire et qu’aucune date d’audience n’avait été fixée. Lorsque le CPJ a appelé Atafu le 3 mai, il a confirmé que les journalistes étaient en détention, mais a déclaré qu’il ne pouvait fournir davantage de détails sur cette affaire. Il n’a pas répondu aux appels de relance ultérieurs du CPJ sollicitant ses commentaires.

Jean-Pierre Lihau Ebua est vice-Premier ministre de la RDC, représentant élu de Bumba et ministre de la Fonction publique et de la Modernisation de l’administration publique, selon Agba et une page biographique publiée par le cabinet du Premier ministre.  Le CPJ l’a appelé pour solliciter ses commentaires, mais il n’a pas répondu.

S’ils sont reconnus coupables d’avoir insulté un membre du gouvernement, les journalistes risquent jusqu’à un an de prison chacun en vertu de l’article 136 du code pénal congolais. Les condamnations pour insulte à quiconque n’étant pas au gouvernement peuvent entraîner jusqu’à deux mois de prison en vertu de l’article 75 de ce code.

Lorsque le CPJ a appelé Serge Mongolu, gouverneur de la province de Mongala, qui comprend Bumba, il a raccroché dès que des questions lui ont été posées sur les arrestations.