Le journaliste Augias Ray Malonga a récemment été interpellé en République du Congo, et les autorités ont suspendu son journal, Sel-Piment. (Photo: Augias Ray Malonga)

Le journal congolais Sel-Piment suspendu pendant 6 mois, son directeur détenu pendant 7 jours

Dakar, 21 mars 2022 — Les autorités de la République du Congo devraient lever immédiatement la suspension de Sel-Piment et arrêter d’interpeller des journalistes en raison de leur travail, a déclaré lundi le Comité pour la protection des journalistes.  

Le 30 décembre 2021, la police a interpellé Augias Ray Malonga, directeur intérimaire du journal privé Sel-Piment, à son domicile situé à Brazzaville, la capitale, selon Malonga et Edouard Atzotsa, secrétaire général de la Fédération syndicale des travailleurs de la communication du Congo-Brazzaville (FESYTRAC), qui se sont tous deux entretenus avec le CPJ via une application de messagerie.

Les autorités ont détenu Malonga pendant sept jours, puis l’ont libéré sans chef d’accusation, a-t-il déclaré au CPJ. 

Le 20 janvier 2022, le régulateur des médias du pays, le Conseil supérieur de la liberté de la communication (CSLC), a suspendu Sel-Piment pendant six mois pour avoir de nouveau publié un article d’un site Web géré par des critiques du gouvernement en exil, selon Malonga et  les médias.

« Les autorités de la République du Congo devraient immédiatement lever la suspension de Sel-Piment et arrêter d’interpeller des journalistes du simple fait de leur travail », a déclaré Angela Quintal, coordinatrice du programme Afrique du CPJ, à New York. « Les journalistes devraient être libres de reproduire des articles et de couvrir les questions d’intérêt public sans craindre d’être détenus ou de faire l’objet de sanctions. »

Le 30 décembre, Malonga a reçu une convocation à comparaître le lendemain au siège de la Direction de la surveillance du territoire (DGST) à Brazzaville, l’agence chargée de la sécurité intérieure du pays, a-t-il déclaré au CPJ. La police l’a ensuite arrêté avant qu’il n’ait pu honorer cette convocation.

L’arrestation a été déclenchée par la republication par le journal le 27 décembre d’un reportage sur la corruption présumée du trésorier du pays initialement publié par Congo-Liberty.com, un site Web géré depuis l’extérieur du pays qui milite pour un changement politique en République du Congo, ainsi que par un autre article également publié dans l’édition du 27 décembre critiquant la gestion de l’économie du pays, a déclaré Malonga.

Lors de sa détention, Phillipe Obara, directeur de la DGST, a interrogé Malonga sur la source du reportage de Congo-Liberty.com et a déclaré que les autorités n’appréciaient pas qu’il soit en contact avec des critiques à l’extérieur du pays. Malonga a indiqué au CPJ qu’il avait refusé de répondre aux questions sur ce reportage. 

Le CPJ a envoyé un courriel à la DGST pour obtenir des commentaires, mais n’a reçu aucune réponse. 

Malonga a déclaré au CPJ avoir été libéré le 6 janvier 2022, après l’intervention du président du CSLC, Philippe Mvouo. Il a indiqué que les autorités ne lui avaient pas divulgué la raison exacte de sa libération. Le CPJ a envoyé un courriel à Mvouo et l’a contacté via une application de messagerie pour obtenir des commentaires, mais n’a reçu aucune réponse. 

Atzotsa a indiqué au CPJ que Malonga « a été libéré sous la pression de nombreuses organisations de presse », y compris le syndicat des journalistes.

D’après les médias, le CSLC a fait valoir que la republication de cet article constituait une diffamation à l’égard du trésorier du pays, et que le journal serait donc suspendu. Le CPJ a envoyé des questions au ministère des Finances, du Budget et du Portefeuille public de la République du Congo par courriel et via un formulaire de contact sur son site Web pour obtenir des commentaires, mais n’a reçu aucune réponse. 

Sel-Piment est un hebdomadaire satirique connu pour ses critiques du président Denis Sassou Nguesso et du Parti congolais du travail au pouvoir, selon les médias. Les autorités ont déjà suspendu Sel-Piment en 2013 et 2021 et interpellé à plusieurs reprises son directeur, le père de Malonga Raymond Malonga.

Malonga a déclaré au CPJ qu’il est devenu directeur intérimaire du journal après l’arrestation de son père en février 2021.