New York, 24 mars 2020 – Les autorités nigériennes doivent libérer immédiatement le journaliste Kaka Touda Mamane Goni et abandonner tous les poursuites contre lui, a déclaré aujourd’hui le Comité pour la protection des journalistes.
Le 5 mars, la police a arrêté Kaka Touda, journaliste indépendant qui publie des actualités sur ses pages Facebook et Twitter chez lui à Niamey, la capitale du Niger, selon l’avocat du journaliste, Boudal Effred Mouloul, qui s’est entretenu avec le CPJ par l’intermédiaire d’une application de messagerie et les informations parues dans la presse.
Son arrestation est survenue à la suite d’une plainte déposée par l’Hôpital Général de Référence local alléguant que les messages publiés par Kaka Touda sur les réseaux sociaux le 4 mars au sujet d’un cas suspect de COVID-19 à l’hôpital constituaient une menace à l’ordre public, selon Boudal et le procureur chargé de l’affaire, Chaibou Samna, qui s’est entretenu avec le CPJ par téléphone.
Le 9 mars, Kaka Touda a été présenté au procureur qui a indiqué que l’État poursuivrait le journaliste pour « diffusion de données de nature à troubler l’ordre public » en vertu de la loi sur la cybercriminalité de 2019 du Niger, a déclaré Boudal au CPJ. Il a ajouté que la prochaine date d’audience de Kaka Touda avait été reportée à deux reprises, la dernière en date le 23 mars, en raison des retards judiciaires liés au virus, et qu’elle était désormais prévue pour le 26 mars.
S’il est reconnu coupable, Kaka Touda pourrait encourir jusqu’à trois ans d’emprisonnement et une amende pouvant atteindre cinq millions de Francs CFA (8 169 $), selon la loi sur la cybercriminalité.
Kaka Touda est détenu à la prison civile de Niamey, a déclaré Boudal. Le journaliste souffre de maux d’estomac, de vertiges et d’une blessure au pied gauche qui s’aggrave, selon une personne qui est récemment entrée en contact avec lui et qui a parlé au CPJ sous couvert d’anonymat par crainte de représailles.
« Kaka Touda Mamane Goni et tous les autres journalistes Nigériens devraient être libres de couvrir l’épidémie de COVID-19 sans craindre d’être jetés en prison. Les autorités nigériennes doivent immédiatement libérer Kaka Touda, veiller à ce qu’il bénéficie de soins médicaux appropriés et abandonner les poursuites à son encontre », a déclaré Angela Quintal, coordinatrice du programme Afrique du CPJ. « Les autorités ne doivent pas confondre la censure et la détention d’un journaliste avec des mesures prudentes de sécurité publique dans le cadre de leur réponse au coronavirus. »
Kaka Touda compte plus de 3 800 abonnés sur Facebook et plus de 6 300 abonnés sur Twitter où il couvre souvent des sujets d’actualité liés à la défense nationale et à la corruption présumée.
Après la publication de Kaka Touda sur le cas suspect de COVID-19 le 4 mars, l’Hôpital Général de Référence a publié une déclaration que le journaliste a publiée sur Twitter démentant l’existence d’un tel cas.
Les autorités nigériennes ont confirmé publiquement le premier cas de coronavirus du pays le 19 mars, selon les informations parues dans la presse.
Samna a déclaré au CPJ que Kaka Touda avait été arrêté parce qu’après sa publication sur un cas suspect de COVID-19 à l’hôpital, « tous les gens se sont enfuis et ont refusé d’aller à l’hôpital ».
Samna a déclaré qu’il ne faisait qu’appliquer la loi dans cette affaire, et a ajouté qu’il voyageait et qu’il n’avait pas encore examiné la plainte officielle.
Le CPJ a appelé l’Hôpital Général de Référence au numéro inscrit dans l’annuaire, mais l’appel n’a pas abouti.