Un policier est aperçu à N'Djamena, au Tchad, le 11 juillet 2015. Un tribunal de N'Djamena a récemment inculpé deux journalistes tchadiens pour diffamation criminelle et a condamné l’un d’entre eux à une peine d’emprisonnement. (Reuters/Moumine Ngarmbassa)
Un policier est aperçu à N'Djamena, au Tchad, le 11 juillet 2015. Un tribunal de N'Djamena a récemment inculpé deux journalistes tchadiens pour diffamation criminelle et a condamné l’un d’entre eux à une peine d’emprisonnement. (Reuters/Moumine Ngarmbassa)

Des journalistes condamnés à des amendes, l’un d’entre eux emprisonné suite à une plainte pour diffamation au Tchad

Dakar, 25 septembre 2019 – Les autorités tchadiennes ne devraient pas s’opposer à l’appel interjeté par les journalistes Martin Inoua Doulguet et Abderamane Boukar Koyon, et devraient prendre des mesures immédiates pour abroger les lois qui criminalisent les actes de journalisme, a déclaré aujourd’hui le Comité pour la protection des journalistes.

Le 23 septembre, un tribunal de la capitale du Tchad, N’Djamena, a reconnu Doulguet, directeur du journal privé Salam Info, coupable des chefs d’accusation de diffamation et de complot, et l’a condamné à trois ans d’emprisonnement suite à une plainte pour diffamation déposée par Toupta Boguena, ancienne membre du gouvernement, selon Olivier Gouara, l’avocat du journaliste, qui s’est entretenu avec le CPJ via une application de messagerie.

Le tribunal a aussi reconnu Koyon, directeur du journal privé Le Moustik, coupable des mêmes chefs d’accusation, sans pour autant le condamner à une peine d’emprisonnement, selon Gouara, qui a aussi représenté Koyon.

Le tribunal a condamné Koyon et Doulguet à payer une amende de un million de francs CFA (1 675 $) chacun à l’Etat, et 20 millions de francs (33 514 $) à Boguena au titre de dommages et intérêts, somme qui devra être payée conjointement par les journalistes, selon Gouara.

Les chefs d’accusation dans les deux affaires découlent de plaintes pour diffamation déposées par Boguena, ancienne ministre tchadien de la Santé, concernant des articles publiés le 19 juin dans Le Moustik et le 14 juillet dans Salam Info, a déclaré Gouara au CPJ. Le 16 septembre, le juge a ajouté des chefs d’accusation d’associations de malfaiteurs aux plaintes initiales pour diffamation, a déclaré Gouara.

Gouara a indiqué avoir fait appel de la decision le mardi 24 Septembre au matin des deux affaires.

« La condamnation du journaliste tchadien Martin Inoua Doulguet à trois ans d’emprisonnement pour avoir publié un article est scandaleuse », a déclaré à Nairobi Muthoki Mumo, représentante du CPJ pour l’Afrique subsaharienne. « Les sanctions financières prises à l’encontre de Doulguet et d’Abderamane Boukar Koyon sont effroyables. Nous appelons à ce que leur recours en appel soit accepté et nous appelons à la libération rapide de Doulguet. »

L’article publié le 19 juin dans Le Moustik, que le CPJ a pu examiner, concernait une plainte pour sorcellerie criminelle et agression sexuelle visant Boguena. L’article publié dans Salam Info, également examiné par le CPJ, concernait une conférence de presse organisée le 13 juillet au cours de laquelle l’enquête criminelle visant Boguena a été abandonnée.

La police a arrêté Doulguet et Koyon le 16 août et les journalistes ont été maintenus en détention jusqu’à leur condamnation le 23 septembre, a déclaré Gouara. Koyon a été libéré après sa condamnation et n’a pas payé l’amende dans l’attente de son appel ; Doulguet a été transféré à la prison d’Amsinéné à N’Djamena, a déclaré Gouara au CPJ.

Gouara a indiqué ne pas connaître les raisons pour lesquelles, seul Douguet ecope d’une peine de prison.

Selon la Banque mondiale, en 2018, le PIB – indicatif économique de richesse produite par habitant par au Tchad – était de 1 920 $ par personne.

Lorsque le CPJ a contacté l’avocat de Boguena, Alain Kagombe, par le biais d’une application de messagerie, celui-ci a décliné les demandes répétées de commentaires sur les affaires Doulguet et de Koyon. Le CPJ a aussi envoyé un message au premier procureur de la Republique de N’Djamena, Youssouf Tome, qui a déclaré qu’il ne pouvait pas faire de commentaires sur les affaires, exerçant son devoir de réserve.