New York, le 28 mars 2011–Le Comité pour la protection des journalistes (CPJ) condamne les agressions, menaces et intimidations contre les journalistes couvrant l’impasse politique sanglante en Côte-d’Ivoire. En effet, aussi bien le gouvernement et les partisans du président Laurent Gbagbo que les combattants rebelles soutenant son rival Alassane Ouattara, harcèlent les médias favorables à leur adversaires.
«Nous sommes alarmés par le nombre croissant d’agressions, de menaces, d’intimidations et de tentatives d’enlèvement de journalistes et de confiscation de matériel de reportage. Ces journalistes sont souvent ciblés à cause des affiliations politiques présumées de leurs médias», a déclaré
Le 16 mars courant, de jeunes pro-Gbagbo munis d’armes et en uniformes militaires ont incendié Téré FM, une station de radio communautaire dans le quartier d’Adjamé à Abidjan, selon des interviews du CPJ. Le directeur de Téré FM, Mahmoud Tangara, a déclaré au CPJ que la station ne diffusait pas de reportages sur l’actualité politique depuis mi-février et ne faisait que passer sur ses ondes des annonces de service public de la Croix-Rouge. Le propriétaire de ladite station, Youssouf Sylla, un élu local, a déclaré au CPJ qu’il estimait que l’attaque était motivée par son soutien politique à M. Ouattara. Les forces de sécurité dans un poste de police attenant à ladite station n’auraient pas intervenues pour arrêter cette attaque, selon M. Tangara.
Le 15 mars, des forces de sécurité fidèles à Gbagbo ont encerclé les locaux du quotidien pro-Ouattara L’Intelligent d’Abidjan, empêchant ainsi la publication de l’édition de ce jour, selon des médias. Le même jour, quatre combattants rebelles se sont emparés sous la menace d’armes d’un véhicule appartenant au groupe de presse Olympe, éditeur des journaux privés Soir Info et L’inter et du magazine Star, selon des journalistes locaux.
Le 13 mars également, des hommes armés ont pris d’assaut les locaux du quotidien pro-Ouattara Nord-Sud à Abidjan pour, selon eux, chercher des armes, selon des journalistes locaux. Les hommes armés n’ont trouvé aucune arme, a dit au CPJ le directeur adjoint de la rédaction,
Certains journalistes se sont mis en cachette après avoir reçu des menaces. Le photojournaliste Stéphane Goué, un responsable du Comité ivoirien pour la protection des journalistes (CIPJ) est rentré en clandestinité ce mois-ci après avoir reçu des menaces liées à ses déclarations publiques au sujet des restrictions de la liberté de la presse, selon des interviews du CPJ. La Fondation des médias d’Afrique de l’Ouest a rapporté qu’André Silver Konan, un éminent journaliste qui est considéré comme un détracteur de Gbagbo, est entré dans la clandestinité suite à une tentative d’enlèvement le 8 mars par de jeunes pro-Gbagbo.
L’insécurité généralisée met également les journalistes en danger. En mi-mars, les domiciles d’Alexandre Lebel Ilboudo, journaliste chevronné du quotidien pro-Ouattara Le Patriote et de Koné Souleymane, journaliste en ligne, ont été attaqués par les combattants rebelles soutenant Ouattara; ces attaques sont perçues comme faisant partie de l’activité criminelle des rebelles. Cependant, le CIPJ signalé que des partisans non identifiés de Gbagbo ont pillé et incendié la résidence du journaliste indépendant David Karidioula le 6 mars. La profession de M. Karidioula et son origine ethnique, qui est associée aux partisans de Ouattara, font de lui une cible, même s’il travaille pour le journal pro-Gbagbo Le Quotidien, a dit M. Goué au CIPJ.