New York, le 4 février 2011— Les peines de prison sévères infligées à deux journalistes rwandaises en vertu des lois vagues et draconiennes du Rwanda contre l’« idéologie du génocide » et le «divisionnisme» auront un effet dissuasif sur la presse de ce pays, a déclaré le Comité pour la protection des journalistes (CPJ).
Un panel de trois juges de la Haute Cour de justice de Kigali, la capitale rwandaise, a condamné vendredi dernier Agnès Uwimana, directrice de publication de l’hebdomadaire privé Umurabyo, à 17 ans de prison et son adjointe, Saidati Mukakibibi, à 7 ans de prison.
Ces deux journalistes ont été condamnées pour des articles publiés par ledit journal en 2010 qui ont critiqué des responsables du gouvernement et contesté l’interprétation officielle du génocide rwandais de 1994, selon des journalistes locaux. Certains des articles commentant sur le génocide ont notamment remis en cause la version gouvernementale selon laquelle seuls les tutsis, qui dominent le gouvernement au pouvoir, ont été massacrés lors des tueries. Mmes Uwimana et Mukakibibi ont été arrêtées en juillet et accusées d’offense au chef de l’Etat, d’incitation à la discrimination, de sectarisme et de négation du génocide.
Cependant, les avocats de la défense ont déclaré au CPJ qu’ils feraient appel de ce verdict auprès de la Cour suprême du Rwanda. En attendant, Mmes Uwimana et Mukakibibi sont détenues à la prison centrale de Kigali.
« Nous condamnons l’utilisation persistante par les autorités rwandaises des lois vaguement formulées contre la négation du génocide et le divisionnisme pour intimider la presse et la dissuader de faire des reportages indépendants sur les conséquences du génocide de 1994 » , a déclaré Mohamed Keita, coordonnateur du Plaidoyer pour l’Afrique du CPJ. « Nous demandons à la Cour Suprême d’annuler les condamnations contre Agnès Uwimana et Saidati Mukakibibi », a-t-il ajouté.
Il convient de rappeler que le CPJ avait précédemment dénoncé la requête par le parquet rwandais de 33 ans de prison pour Mme Uwimana et 12 ans de prison pour Mme Mukakibibi.