New York, le 17 juillet 2002—Le journaliste de radio haïtien Israel Jacky Cantave et son cousin, qui avaient disparu le 15 juillet, ont été retrouvés ligotés et les yeux bandés sur le bord de la route la nuit dernière.
Cantave, qui est connu pour ses enquêtes en profondeur sur des sujets sensibles, travaille pour Radio Caraïbes, basée à Port-au-Prince, la capitale d’Haïti.
Depuis l’hôpital où les deux hommes ont été transportés, Cantave, 28 ans, a exliqué à CPJ ce qui est arrivé à son cousin, Frantz Ambroise, et lui après qu’ils aient quitté la radio dans la nuit de lundi.
Cantave a déclaré que, en rentrant chez eux, son cousin et lui se sont rendu compte qu’une jeep rouge les suivait. Un arrêt à une station service n’a pas réussi à semer leurs poursuivants, et peu après un autre véhicule—un camion dont ils n’ont pu distinguer la couleur—a foncé dans leur voiture les forceant à s’arrêter.
Quand Cantave et Ambroise sont descendus de leur voiture, deux hommes masqués leur ont demandé, sous la menace d’un revolver, qui d’entre eux était Cantave. Après que le journaliste se soit identifié, ses agresseurs lui ont dit qu’ils allaient le tuer. Cantave a raconté qu’il y avait quatre hommes armés dans le camion mais qu’il ne savait pas dire combien il y en avait dans la jeep. Tous les agresseurs étaient masqués.
Cantave et Ambroise ont alors été poussés dans un des véhicules. Les agresseurs leur ont lié les mains, bandés les yeux, les ont bâillonés et les ont emmenés dans une maison où ils ont été retenus prisonniers près de 24 heures.
Cantave a ajouté qu’il a été interrogé et roué de coups à plusieurs reprises et que ses agresseurs lui ont fait écouter sa mere pleurant sur les ondes de Radio Kiskeya basée à Port-au-Prince. “C’est la dernière fois que tu entends la voix de ta mère,” sont les propos des agresseurs rapportés par le journaliste.
Cantave a assuré qu’il était évident que ses agresseurs étaient au courant des recherches enterprises pour le retrouver et cela les préoccupait.
Pendant son interrogatoire, Cantave pouvait entendre les cris d’Ambroise, qui, comme cela s’est avéré, était en train de se faire frappé avec un bâton.
Les deux hommes ont alors été embarqués de force dans une voiture -toujours avec les yeux bandés et les mains liées- et jetés sur le bord de la route. Des passants ont entendu Cantave crier à l’aide et les ont ammenés au bureau de police local d’où ils ont été conduits à l’hôpital.
Cantave suppose que ses enquêtes sur plusieurs sujets sensibles pour Radio Caraïbes ont provoqué son agression et son enlèvement. Questionné pour savoir s’il appréhendait de reprendre le travail, Cantave a déclaré, “Pas du tout, au contraire. Je vais continuer à travailler beaucoup plus parce que je sais que je fais un travail équitable.” Il a ajouté. “Je dénonce ce qui ne va pas et j’applaude ce qui va.”
“Nous sommes vraiment soulagés que Israel Jacky Cantave et son cousin aient été retrouvés vivants,” s’est réjoui la directrice de CPJ Ann Cooper. “Mais nous restons inquiets concernant les représailles endurées par les journalistes qui essayent d’informer le public sur la situation de leur pays. Nous conseillons vivement aux authorités haïtiennes de mener une enquête approfondie sur cette attaque et de s’assurer que la justice soit rendue.”
Le mois dernier, durant une mission de recherche de trois jours à Port-au-Prince, une délégation de CPJ a constaté que les journalistes en Haïti font face à une atmosphère d’intimidation et de peur. Des journalistes haïtiens ont parlé à CPJ d’attaques violentes et de menaces qui restent en grande partie impunies. Certains ont été obligés de se censurer, de se cacher ou même de quitter le pays.
FIN