Attaques contre la presse en 2008: En bref

AFRIQUE DU SUD

         En janvier, le journaliste freelance Hein Coetzee a été arrêté après un reportage sur la brutalité de la police lors d’une descente dans la partie Est du Cap. Dans son article, publié dans le journal local Kaapse Son, Coetzee a accusé la police de mauvais traitements, gifles et menaces à l’encontre de la population. Il a été inculpé de plusieurs crimes avant que ces charges soient finalement toutes abandonnées.

 

ANGOLA

    En octobre, trois journalistes de Rádio Nacional de Angola, média public, ont été suspendus sine die après avoir mis en question les choix ministériels du président José dos Santos. Le président avait nommé les ministres après que son parti, le Mouvement populaire pour la libération de l’Angola, avait remporté un raz-de-marée aux élections législatives de septembre. Le commentateur politique Victor Silva, le présentateur Amilcar Xavier et le rédacteur en chef Andeiro João ont été suspendus de leurs fonctions, a annoncé le média d’Etat.

 

BURUNDI

         Jean-Claude Kavumbagu, directeur de l’agence de presse en ligne Net Press, a été arrêté le 11 septembre et inculpé pour diffamation, selon des journalistes locaux et Human Rights Watch. Philipe Nzabonariba, un haut fonctionnaire, a déposé plainte contre lui après un article, publié le 10 août, critiquant la somme dépensée pour le voyage présidentiel aux Jeux Olympiques de Pékin. Kavumbagu a fait appel, mais aucune date de procès n’a été fixée. Il est détenu à la prison centrale de Mpimba, dans la capitale Bujumbura.

 

COTE D’IVOIRE

         En février, le Conseil national de l’audiovisuel a suspendu sine die la diffusion en FM de Radio France Internationale, financée par le gouvernement français. Franck Kouassi, secrétaire général du Conseil, a dit qu’il avait agi ainsi car la station n’avait pas désigné de correspondant permanent dans le pays. Les autorités ont levé l’interdiction en mai après la nomination de Norbert Navarro comme correspondant. Navarro est le premier correspondant permanent de la station depuis l’assassinat de Jean Hélène, en 2003. 

         En août, le parlement a adopté à l’unanimité une législation contre la xénophobie, le racisme et le tribalisme. Cette mesure prévoit des peines de prison allant jusqu’à 20 ans pour des infractions commises par tout média, selon la presse internationale. Certains militants des droits de l’homme ont exprimé leur inquiétude sur les abus possibles des dispositions de la loi formulées en termes vagues, selon Inter-Press Service.

 

GABON

         En mars, le Conseil national de la communication, organe d’Etat, a suspendu le bimestriel privé Tendance Gabon pour trois mois après l’avoir accusé de mener « une campagne de dénigrement » contre le président Omar Bongo, selon des journalistes locaux. Le journal avait reproduit un article sur les biens de Bongo en France, d’abord paru dans le quotidien français Le Monde.

         Claude Ada Mboula, caméraman à la station privée Télé Africa, a été hospitalisé en avril après que la police l’a agressé au cours d’une marche antigouvernementale dans la capitale Libreville, selon la presse et des journalistes locaux. Les agents ont saisi sa caméra après qu’il a filmé la police en train de rosser le dirigeant d’une manifestation contre la hausse des prix. Mboula a eu trois côtes cassées, selon la presse.

 

GHANA

         En août, la police a investi les bureaux de la station pro-opposition Radio Gold FM à Accra et a battu trois membres du personnel, selon la Fondation pour les médias d’Afrique de l’Ouest. La descente a eu lieu après que la radio a interviewé un militant du Parti national des patriotes, au pouvoir, qui était accusé de fraude pendant les élections locales. La police a nié être responsable de l’attaque, affirmant avoir simplement visité la station après avoir reçu un appel pour cambriolage.

 

GUINEE

         Le Conseil national de la communication, organe d’Etat, a suspendu pour trois mois, à compter de début janvier, les hebdomadaires privés La Vérité et L’Observateur. Il a aussi été interdit à sa direction de travailler en tant que journalistes pendant cette période. Le conseil a accusé ces journaux de « continuellement publier des articles insultants, méprisants et diffamatoires » de nature à « manipuler l’opinion publique ». La direction de ces journaux a déclaré au CPJ que cette décision était liée à des articles critiques à l’encontre de hauts responsables du gouvernement.

 

LESOTHO

         L’Autorité pour la communication a suspendu pour trois mois à partir de juillet la station privée Harvest FM, selon l’avocat de cette radio, Haae Phoofolo. Cette décision fait suite à des plaintes en diffamation déposées par deux responsables du gouvernement. Le chef de la police Malejaka Letooane a porté plainte contre la station après qu’elle a rapporté qu’un suspect était mort en garde à vue. L’autre plainte est venue d’un haut responsable du ministère de la Communication, Tseliso Mokela, qui a dit que le populaire talk show de la station, « Lève-toi et brille », était critique à l’encontre de son ministère.  

 

NAMIBIE

         En février, le gouvernement a annoncé un plan visant à établir un Conseil des médias afin d’observer la déontologie de la presse et de répondre aux plaintes du public à propos de ses reportages. Netumbo Nandi-Ndaitwah, ministre de l’Information et de l’audiovisuel, a fait l’annonce en accord avec un projet de résolution par le congrès du parti Swapo, au pouvoir. Fin 2008, cependant, le gouvernement n’avait pas encore donné de suite à l’établissement du conseil.

         Le 5 août, les Namibiens se sont réveillés avec la nouvelle de la mort de Hannes « Smittie » Smith, journaliste de premier plan, cofondateur et rédacteur en chef de l’hebdomadaire Windhoek Observer. Il a succombé à la maladie d’Alzheimer, à l’âge de 75 ans. Smith, qui a passé trente ans au Windhoek Observer, s’était élevé contre l’injustice à une époque où il n’était pas bien vu de le faire. Il avait souvent été en conflit avec la hiérarchie afrikaner, pendant l’ère de l’apartheid.

 

NIGERIA

         En février, dix hommes armés se sont immiscés dans un atelier de travail où étaient réunis une quarantaine de journalistes à Iyaganku. Déguisés en participants du séminaire, les agresseurs ont tabassé les journalistes et leur ont volé leurs biens, selon la presse locale. Aucune arrestation n’a eu lieu, selon le journal The Vanguard.

         En avril, quatre réalisateurs américains de documentaires et un citoyen nigérian ont été arrêtés par l’armée nigériane dans l’Etat du Delta. L’équipe de tournage, venue de Seattle, a passé une semaine en prison sans être inculpée, selon le réalisateur Sandy Cioffi. L’équipe réalisait un documentaire sur le conflit entre le gouvernement et les groupes armés dans la région du delta du Niger, riche en pétrole.

         En août, des agents de la sécurité d’Etat de la ville méridionale de Port-Harcourt ont détenu le réalisateur américain freelance Andrew Berends et son interprète nigérian Samuel George. Berends a été libéré après 36 heures mais a été contraint de subir dix jours d’interrogatoires avant d’être expulsé. George a été libéré après cinq jours de détention mais a été interrogé pendant trois autres semaines. Un porte-parole de l’armée a déclaré que les deux hommes étaient détenus après avoir filmé un déploiement de l’armée nigériane sans autorisation, affirmation que Berends récuse.

         En octobre, les agents de la sécurité d’Etat ont arrêté le blogueur politique Jonathan Elendu alors qu’il se présentait à l’aéroport d’Abuja en provenance des Etats-Unis. Elendu, rédacteur en chef du site Internet ElenduReports, basé à Lansing, dans l’Etat du Michigan, a été maintenu au secret et sans inculpation pendant dix jours, bien au-delà de la limite de 48 heures fixée par la loi nigériane sur la détention préventive. Le porte-parole des services de sécurité, Kenechukwu Onyeogu, a déclaré au CPJ qu’Elendu avait été « invité » à un interrogatoire sur des questions de sécurité nationale liées à ses reportages. Interrogé par le CPJ après sa libération, Elendu a dit que les agents l’avaient questionné sur ses liens présumés avec le blog politique nigérian SaharaReporters, ses sources d’information, son financement et ses opinions politiques.

         Le même mois, des agents de la sécurité ont interpellé le blogueur politique Emmanuel Emeka Asiwe alors qu’il arrivait à l’aéroport de Lagos en provenance des Etats-Unis. Un porte-parole des services de sécurité a dit au CPJ que Asiwe, rédacteur en chef de HuhuOnline, basé à Arlington, dans le Massachusetts, a été « interrogé sur des questions de sécurité nationale ». Il a été libéré sans être inculpé après avoir été maintenu au secret pendant huit jours. Asiwe a reçu l’ordre de se présenter régulièrement aux services de sécurité, selon l’avocat de la défense Babalola Akimwumi.

 

REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE

         Les autorités de la capitale Bangui ont détenu Faustin Bambou, rédacteur en chef de l’hebdomadaire privé Les Collines de l’Oubangui, à cause d’un éditorial alléguant de détournements de fonds publics. Mis en prison, Bambou a été inculpé d’incitation aux troubles, révolte contre les institutions publiques et diffamation. Il a été condamné à six mois de prison, mais a été relâché sur grâce présidentielle après 43 jours d’emprisonnement, selon la presse et des journalistes locaux.   

 

REPUBLIQUE DU CONGO

         En juillet, la police de Pointe Noire a détenu pendant une nuit Christian Perrin, directeur de l’information à Télé Pour Tous. Perrin a été inculpé pour diffusion de fausses nouvelles et d’incitation à la révolution à cause d’un débat politique dans lequel les participants ont comparé le président Denis Sassou-Nguesso au président zimbabwéen Robert Mugabe. En août, un tribunal de Pointe Noire a condamné Perrin à une amende de 500 000 francs CFA (1 100 dollars US), selon son avocat.

 

SIERRA LEONE

         En octobre, le directeur ainsi qu’un membre du personnel de la Société pour les initiatives démocratiques (SDI), un groupe sierra léonais de défense des médias, ont reçu des menaces de mort après la publication d’un rapport sur la situation de la presse.

 

         Emmanuel Saffa Abdulai, directeur de la SDI et John Baimba Sesay, chargé de l’information, ont reçu des menaces téléphoniques presque tous les jours en octobre, a déclaré Abdulai au CPJ. Les menaces sont intervenues après que la SDI a publié un rapport intitulé « L’état des médias en Sierra Leone : l’année du gant de velours ». Ce rapport a été largement diffusé parmi les médias nationaux. La SDI a déposé plainte auprès de la police, a dit Abdulai.

 

 

TANZANIE

         Le ministre de l’Information a interdit l’hebdomadaire privé MwanaHalisi pour une période de trois mois, à compter d’octobre, pour « incitation à la haine publique envers le président ». La police a aussi interrogé le directeur de la rédaction du journal, Saed Kubena et l’a inculpé pour sédition. L’affaire fait suite à un article de Une décrivant un complot présumé visant à évincer le président Jakaya Kikwete, selon le ministre de l’Information, George Mkuchika. Fin 2008, cette poursuite pénale demeurait pendante.

 

TCHAD

         En janvier, la police de la capitale Ndjamena a fermé FM Liberté, une station lancée par des militants locaux des droits de l’homme. Lazare Djekourninga Kaoutar, directeur, a été détenu pendant deux jours et relâché sans être inculpé, selon la presse et des journalistes locaux. La police a accusé les responsables de la radio de diffuser des « fausses » nouvelles après la lecture sur les ondes d’une pétition sur les pratiques de corruption dans la délivrance des cartes d’identité nationales. La station a été autorisée à émettre à nouveau en juin.
 

         En février, après une attaque rebelle meurtrière sur Ndjamena, les autorités ont interdit la couverture de la rébellion armée et toute information « mettant en danger l’unité nationale », dans le cadre d’un état d’urgence décrété sur l’ensemble du pays. Le ministre de la Communication de l’époque, Hourmadji Moussa Doumgor, a dit que ces restrictions étaient des mesures justifiables en temps de guerre et a accusé les journaux indépendants d’être des « relais des agresseurs », selon la presse et des journalistes locaux. Craignant les représailles du gouvernement, au moins 14 journalistes indépendants ont provisoirement pris la clandestinité au Cameroun et au Nigeria voisins, selon l’enquête du CPJ. Le même mois, le président Idriss Déby a publié un décret qui rend effectivement passible de poursuites pénales tout reportage critique sur des sujets sensibles comme la rébellion armée et les relations interethniques.

         En mars, le gouvernement a retiré sans explication son permis de travail à la journaliste française freelance, Sonia Rolley, la contraignant à quitter le pays, selon la presse internationale. Rolley était la seule correspondante étrangère permanente à l’époque. Dans un entretien téléphonique avec le CPJ en juin, le ministre de la Communication Mahamat Hissène a déclaré n’avoir aucune information au sujet de l’expulsion de Rolley.

 

TOGO

         En février, la Haute autorité sur l’audiovisuel et la communication a interdit sine die tout commentaire par Daniel Lawson-Drackey, journaliste à Nana FM et militant de la presse. La décision incrimine Drackey de violation de la déontologie journalistique sans pour autant donner de détails. Des journalistes locaux ont dit au CPJ penser que la décision est une tentative de réduire au silence Drackey à cause de ses opinions critiques envers le gouvernement. 

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