Un policier vise des manifestants lors de manifestations à Port-au-Prince, Haïti, le 8 février 2021. Deux journalistes ont été blessés par balles alors qu’ils couvraient ces manifestations. (Reuters/Jeanty Junior Augustin)

Les journalistes Alvarez Destiné et Méus Jeanril blessés par balles alors que la police et les forces armées dispersent la manifestation en Haïti

Miami, le 9 février 2021 — Les autorités haïtiennes doivent mener une enquête approfondie sur l’incident où les journalistes Alvarez Destiné et Méus Jeanril ont été blessés par balle, identifier les responsables et leur demander des comptes, a déclaré aujourd’hui le Comité pour la protection des journalistes.

Hier après-midi, dans le quartier du Champ-de-Mars de Port-au-Prince, la capitale, des attaquants non identifiés ont tiré sur Destiné et Jeanril alors qu’ils couvraient des manifestations appelant au départ du président Jovenel Moïse, selon des articles de presse et Jacques Desrosiers, secrétaire général de l’Association des journalistes haïtiens, un groupe commercial local, qui s’est entretenu avec le CPJ via une application de messagerie.

Les fusillades ont eu lieu alors que des membres de la police nationale haïtienne et des forces armées tiraient à balles réelles pour disperser les manifestants, selon les reportages. Selon ces reportages, les manifestants ont jeté des pierres, mais n’ont pas tiré d’armes.

Destiné, propriétaire du diffuseur Internet Actualités Locales TV, où il travaille également comme reporter, a été touché à la main ; Jeanril, reporter pour la chaîne de télévision en ligne Tele Pam, a été touché à l’estomac, selon Desrosiers. Tous deux ont été emmenés d’urgence à l’hôpital Bernard Mevs ; Destiné est sorti hier soir, mais Jeanril est dans un état critique et attend d’être opéré, selon Desrosiers.

En novembre 2019, le CPJ et Reporters sans frontières ont écrit une lettre aux autorités haïtiennes pour leur demander d’enquêter sur les multiples fusillades de journalistes couvrant les manifestations.

« Une fois de plus, les journalistes qui couvrent les manifestations en Haïti sont confrontés à une violence mortelle. Les autorités haïtiennes doivent prendre des mesures sérieuses pour garantir que la presse puisse travailler sans craindre d’être abattue », a déclaré Natalie Southwick, coordinatrice du programme Amérique du Sud et centrale du CPJ, à New York. « Ceux qui ont tiré sur les journalistes Alvarez Destiné et Méus Jeanril doivent être identifiés le plus rapidement possible et doivent répondre de leurs actes ».

Le CPJ a appelé la police nationale haïtienne et les forces armées pour leur demander des commentaires, mais personne n’a répondu. Jodel Lessage, commandant en chef des forces armées haïtiennes, a publié une déclaration niant que des membres des forces armées aient été impliqués dans les fusillades et affirmant que ces allégations étaient « information purement mensongère et totalement erronée, véhiculée sciemment à des fins de manipulation de l’opinion publique ».

Parmi les incidents documentés par le CPJ en 2019, on peut citer les blessures du journaliste Chery Dieu-Nalio après que le sénateur Jean Marie Ralph Féthière a tiré avec un pistolet sur une foule de manifestants, et le tir sur le cameraman Edmond Agenor Joseph par un policier lors d’affrontements à Port-au-Prince. Les autorités haïtiennes n’ont pas répondu à cette lettre.