Les forces de police à N'Djamena, au Tchad, le 15 juin 2015. La police a récemment arrêté le journaliste Ali Hamata Achène pour des actes présumés de diffamation et d’outrage à magistrat. (AFP/Brahim Adji)
Les forces de police à N'Djamena, au Tchad, le 15 juin 2015. La police a récemment arrêté le journaliste Ali Hamata Achène pour des actes présumés de diffamation et d’outrage à magistrat. (AFP/Brahim Adji)

Un journaliste tchadien détenu depuis le 26 décembre suite à une plainte pour diffamation

Vancouver, Canada, 6 janvier 2020 – Les autorités tchadiennes devraient libérer le journaliste Ali Hamata Achène, et mettre un terme aux procédures criminelles pour diffamation et aux représailles contre les reporters, a déclaré aujourd’hui le Comité pour la protection des journalistes.

La police a arrêté Achène, correspondant de la station radio privée Dja FM, à Mongo, chef-lieu de la province du Guéra située au centre-sud du Tchad, le 26 décembre 2019, selon un communiqué de presse publié sur Facebook par son employeur et un article du radiodiffuseur français Radio France Internationale.

Achène s’est présenté à la gendarmerie locale de Mongo après avoir été convoqué par la police judiciaire ; à son arrivée, la police l’a arrêté pour des actes présumés de diffamation et d’outrage à magistrat, selon ce communiqué de presse.

Lorsqu’elles l’ont arrêté, les autorités ont montré à Achène une copie d’un article qu’il avait publié sur son compte personnel Facebook, selon le communiqué de presse et un responsable de Dja FM qui s’est entretenu avec le CPJ sous couvert d’anonymat, par crainte de représailles. Un policier a déclaré que les autorités désapprouvaient ce qu’Achène diffusait sur Dja FM, mais qu’elles ne disposaient pas de preuves de ses déclarations jusqu’au jour où elles ont vu son message sur Facebook, a déclaré le responsable.

Le CPJ a examiné une copie de ce message, qui faisait état d’une corruption présumée dans le système juridique de Mongo. Achène a publié à l’occasion des commentaires sur la politique locale sur sa page Facebook, qui ont été examinés par le CPJ.

Achène n’a été présenté à aucun juge depuis sa détention, et en date du 6 janvier, aucun chef d’accusation n’a été formellement retenu contre lui, a déclaré le responsable de Dja FM au CPJ.

« L’arrestation du journaliste radio Ali Hamata Achène envoie un message dissuasif à ceux qui cherchent à faire la lumière sur les questions de gouvernance au Tchad », a déclaré Angela Quintal, coordinatrice du programme Afrique du CPJ, depuis New York. « Achène devrait être libéré, et le Tchad devrait cesser ses poursuites criminelles à l’encontre des journalistes qui ne font que leur travail. »

Le journaliste a passé la nuit du 26 décembre à la gendarmerie, puis a été transféré à la prison de Mongo le 27 décembre, selon un massage Facebook publié par Dja FM.

Le CPJ n’a pas pu déterminer immédiatement l’origine de la plainte pour diffamation. La seule personne dont le nom a été mentionné dans le message Facebook d’Achène, qui a été effacé, était Djimet Arabi, le ministre tchadien de la justice.

Arabi a confirmé au CPJ par l’intermédiaire d’une application de messagerie qu’Achène était poursuivi pour outrage à magistrat et qu’il était en détention provisoire. Arabi n’a pas répondu aux autres questions du CPJ concernant la plainte pour diffamation.

Selon un article de Radio France Internationale, l’arrestation d’Achène a fait suite à une plainte déposée par un procureur de la république, dont le nom n’a pas été cité dans cet article.

Achène est détenu en cellule d’isolement depuis le 30 décembre, selon un autre message publié par le radiodiffuseur.

Le responsable de Dja FM a déclaré au CPJ qu’Achène avait été mordu par un reptile pendant son isolement, et que son pied était depuis gonflé. Arabi a réfuté l’affirmation selon laquelle Achène était détenu en cellule d’isolement et, sans plus de précision, a dit au CPJ de ne pas s’inquiéter pour la santé du journaliste.

Les autorités avaient déjà détenu Achène le 23 décembre 2019, dans le bureau d’Atteib Mahamat, un procureur de la république de Mongo, parce que les questions posées par le journaliste sur la corruption présumée dans le système juridique local, selon un message Facebook publié par Dja FM ce jour-là.

Le CPJ a appelé Mahamat pour solliciter ses commentaires mais personne n’a répondu au téléphone.

En septembre 2019, un tribunal du Tchad a condamné Martin Inoua Doulguet, directeur de publication du journal privé Salam Info, à trois ans d’emprisonnement pour diffamation et complot suite à une plainte pour diffamation déposée par Toupta Boguena, ancien ministre tchadien de la santé, selon les recherches du CPJ.