New York, le 7 novembre 2008-–Le Comité pour la protection des journalistes (CPJ) s’est aujourd’hui réjouit de la libération d’un journaliste belge et de ses deux collaborateurs qui ont été enlevés mardi au cours d’un reportage sur la guerre dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC). Cependant, le CPJ demeure préoccupé par la sécurité des journalistes dans la ville de Kiwanja sous contrôle des rebelles, où la seule station de radio a été saccagée.
En effet, le journaliste belge, Thomas Scheen, son interprète congolais, Charles Ntiricya, et son chauffeur, Roger Bangue, ont été libérés aujourd’hui, trois jours après leur enlèvement mardi dernier à Kiwanja par des miliciens progouvernementaux Maï Maï, selon des journalistes locaux et des médias internationaux. M. Scheen, âgé de 43 ans et correspondant du quotidien allemand Frankfurter Allgemeine Zeitung, faisait la couverture de la situation sécuritaire à Kiwanja, selon M. Ntiricya, qui a parlé au CPJ aujourd’hui peu de temps après leur libération confirmée par le journal germanophone dans une déclaration.
«Nous sommes soulagés que nos collègues aient été libérés sains et saufs dans un climat de combats terribles dans l’est de la RDC», a déclaré le directeur de la section Afrique du CPJ, Tom Rhodes. «Toutes les parties impliquées dans ce conflit ainsi que les Casques bleus de l’ONU doivent assurer la sécurité des journalistes qui risquent leur vie pour assurer la couverture de cette tragédie», a-t-il ajouté.
Environ 250.000 civils se sont enfuis de leurs domiciles depuis le début des combats en septembre dernier entre l’armée congolaise et les rebelles du Congrès national pour la défense du peuple (NCDP). Le conflit est alimenté par des tensions ethniques entre les Hutus et les Tutsis, issues du génocide de 1994 au Rwanda voisin. Ces groupes se battent aussi pour les droits sur les riches gisements de minéraux, notamment le coltan, qui est utilisé dans les téléphones mobiles.
Racontant son calvaire au CPJ, M. Ntiricya a souligné que les miliciens armés Maï-Maï les ont arrêtés sur la route entre Kiwanja et la capitale provinciale, Goma, ont saisi leurs biens et les ont attachés avant de les amener au commandant de la milice. Après un interrogatoire, le commandant leur aurait demandé 800 dollars américains pour les libérer. Alors, dans l’impossibilité de payer ce montant, ils ont été conduits sur 40 kilomètres de marche à un haut responsable politique Maï-Maï qui les a remis à l’armée congolaise. Ils ont finalement été retrouvés par les Casques bleus de l’ONU cet après-midi. M. Ntiricya a ajouté qu’ils sont tous les trois en bonne santé, bien qu’ils se sentent fatigués. Cependant, leur voiture et leurs biens n’ont pas été retrouvés.
Par ailleurs, les journalistes Alfred Nzonzo Bitwahiki et Faustin Tawite de la Radio Communautaire Ushirika sise à Kiwanja, qui ont été portés disparus ou morts entre mardi et jeudi par la Radio Onusienne Okapi et l’ONG Human Rights Watch, sont sous la protection des Casques bleus de l’ONU, selon Tuverekwtvyo Muhundo, le représentant local de l’organisation pour la défense de la liberté de la presse Journaliste En Danger. Un assaut de rebelles sur Kiwanja a forcé cette station à suspendre ses programmes et à fermer mardi après-midi, a dit au CPJ son directeur, Jean-Baptiste Kambale. Les employés se sont dispersés et ont fui la ville au cours des combats chaotiques et les rebelles ont pillé la station qui est l’unique chaîne de radiodiffusion de Kiwanja, a souligné M. Kambale. Selon lui, la station diffusait des déclarations à la presse du gouvernement ainsi que des entretiens avec des autorités au sujet de la situation sécuritaire qui sévit dans cette zone.
Quatre autres stations dans la zone de guerre ont préventivement fermé, par crainte de pillage, selon M. Kambale, qui dirige également le Réseau des radios et télévisions de l’est du Congo, connu sous le nom de RATECO. Dorika FM, une station sise à Nyamilima, près du parc de Virunga, abritant les dernières populations de gorilles de montagne, a repris l’antenne aujourd’hui pour diffuser des communiqués d’intérêt public sur les personnes disparues, a-t-il dit.