Trois condamnations à mort pour le meurtre d’un journaliste congolais

New York, le 22 mai 2008–Trois hommes accusés d’avoir tué le journaliste congolais Serge Maheshe en 2007 ont été reconnus coupables et condamnés à mort, tandis que deux autres ont été acquittés dans un nouveau procès qui s’est terminé mercredi. Le procès n’a pas réussi à établir un mobile clair pour le crime, selon des médias et des journalistes locaux. Le Comité pour la protection des journalistes  (CPJ) est préoccupé par le fait que des aspects essentiels de l’affaire soient restés en suspens, notamment le mobile et l’implication probable de commanditaires.

M. Maheshe, qui était le rédacteur en chef adjoint de la radio Okapi parrainée par l’ONU, a été abattu, à l’âge de 31 ans, dans la soirée du 13  juin 2007, dans la ville frontalière de Bukavu, dans la province agitée du Sud-Kivu a l’est de la République Démocratique du Congo, alors qu’il s’apprêtait à monter à bord d’un véhicule des Nations unies avec deux amis. Un jugement en août 2007 avait abouti à la condamnation de quatre hommes, y compris deux compagnons de M. Maheshe. Le procès avait été entaché d’allégations d’irrégularités, notamment des accusations d’une enquête médico-légale insuffisante et l’abandon soudain par le ministère public des théories impliquant deux soldats comme étant les tireurs. Un appel avait alors conduit à la révision du procès qui a pris fin cette semaine.

Mercredi dernier, le tribunal militaire qui supervise l’affaire a confirmé les condamnations à mort prononcées en août 2007 contre Freddy Bisimwa et Mastakila Rwezangabo, selon des médias. Une nouveau prévenu, Patient Bisimwa Sikitu, a été reconnu coupable et condamné à mort sous une accusation d’association de malfaiteurs.

En revanche, le tribunal a annulé la condamnation d’Alain Mulimbi et de Serge Muhima, les compagnons de Maheshe, selon des médias. Ces deux hommes, alors accusés d’être les commanditaires du crime, avaient été condamnés l’an dernier sur la base de déclarations faites par les deux tireurs présumés. Ces derniers sont par la suite revenus sur leurs accusations dans une lettre écrite en septembre 2007 depuis la prison.

Cette lettre a suscité une controverse qui a été reconnue par le président congolais Joseph Kabila, qui a admis les «faiblesses» du système judicaire de la RDC même s’il a affirmé que le gouvernement avait « toujours arrêté les auteurs ou du moins les présumés coupables » de meurtres de journalistes, selon des médias.

« Nous sommes préoccupés par le fait qu’une fois de plus la procédure judiciaire n’ait pas établi un mobile clair pour le crime et que les possibles commanditaires de ce meurtre restent dans l’ombre », a déclaré Tom Rhodes, directeur de la section Afrique du CPJ. « Nous appelons les autorités congolaises à poursuivre la recherche de la vérité dans cette affaire jusqu’au bout. », a-t-il ajouté.

Le nouveau procès, qui avait débuté en février, a été critiqué par la Mission de l’ONU en RDC (la MONUC) pour « plusieurs graves violations des droits fondamentaux à un procès équitable », comme la présomption d’innocence et le bon traitement des preuves, selon des recherches du CPJ. Des informations ont fait état de menaces de mort contre des journalistes, des observateurs et des avocats lors de ce procès, selon les médias locaux et internationaux.
 
M. Maheshe est parmi quatre journalistes assassinés en RDC depuis 2005. Les autres étaient: le journaliste chevronné en questions politiques Franck Ngyke Kangundu, qui a été tué avec sa femme, le journaliste indépendant Bapuwa Mwamba, et le photojournaliste Patrick Kikuku Wilungula.

Radio Okapi a cité la défense disant qu’elle fera appel contre ce verdict.

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