New York, 15 janvier 2008—Un tribunal de la capitale de la république centrafricaine, Bangui, a envoyé aujourd’hui le directeur d’un journal en maison d’arrêt en attendant son procès sur des accusations criminelles liées à un article sur un scandale politique.
En effet, Faustin Bambou du bihebdomadaire Les Collines de l’Oubangui a été transféré à la maison d’arrêt de Ngaraba à Bangui, après son inculpation pour « incitation aux troubles à l’ordre public et au soulèvement contre les institutions »—un délit passible d’une peine maximum de 10 ans d’emprisonnement selon le code pénal centrafricain, a déclaré l’avocat de la défense, Mathias Barthélemy Morouba.
Le procureur de la république a aussi formulé des accusations de diffamation, passible d’une amende pouvant aller jusqu’à 500.000 CFA francs (1.100 dollars américains), selon M. Morouba. La défense fera un recours à l’audience de la cour prévue la semaine prochaine pour la libération provisoire M. Bambou, a-t-il dit.
« La république centrafricaine a dépénalisé les lois sur la presse il y’a trois ans, cependant les journalistes continuent d’être emprisonnés pour leur travail », a déclaré le directeur exécutif du CPJ, Joel Simon. « Nous appelons le gouvernement centrafricain à immédiatement lever toutes les accusations contre Faustin Bambou et à respecter ses propres lois », a-t-il martelé.
M. Bambou a été convoqué vendredi dernier par téléphone au bureau du procureur de la république et placé en garde à vue pour un article publié le 21 décembre dernier qui alléguait que le ministre centrafricain des mines, Sylvain Doutingaï, et celui des affaires étrangères, Côme Zoumara, ont détourné 7 milliards de francs CFA (16 millions de dollars américains), qui devaient prétendument servir à payer les salaires des fonctionnaires centrafricains, selon les journalistes locaux et des recherches du CPJ.
Les ministres incriminés n’ont pas répondu publiquement à ces allégations, cependant le procureur a affirmé que l’article « incitait » le plus grand syndicat du pays à la grève—qu’il mène d’ailleurs depuis le 2 janvier—à cause du non paiement de plusieurs mois d’arriérés de salaires dus aux fonctionnaires centrafricains, selon les médias.
M. Doutingaï et M. Zoumara ont cependant déposé lundi une plainte contre M. Bambou, a dit M. Morouba.
M. Bambou est le second journaliste à être emprisonné depuis que son pays a dépénalisé les délits de presse en 2005, selon des recherches du CPJ. Auparavant, en mars 2007, Michel Alkhaly Ngady, qui est à la tête d’une association locale d’éditeurs de la presse privée, avait passé deux mois en prison sous des accusations similaires, après avoir publié un communiqué de presse contestant une décision de l’organe public de régulation des médias.
Il convient de rappeler qu’en Juillet 2003, M. Bambou avait été plusieurs fois convoqué par la police et pressé de révéler ses sources concernant un article qui alléguait qu’un homme d’affaires du pays essayait d’extorquer le gouvernement, selon des recherches du CPJ.