Au Niger, RFI sommairement suspendue et son correspondant menacé de mort

New York, le 20 juillet 2007—Ce jeudi, le gouvernement nigérien a suspendu la diffusion de Radio France Internationale (RFI), basée en France, accusant la station d’avoir « diffusé de fausses informations », au sujet d’une récente rébellion armée des nomades touaregs dans le nord du Niger, selon des journalistes locaux et des bulletins d’information. La décision est survenue moins d’une semaine après que le chef de l’armée ait menacé de tuer un correspondant expérimenté de RFI.

« Nous condamnons la suspension sommaire de RFI », a déclaré le directeur exécutif du CPJ Joël Simon. « Nous appelons les autorités à cesser la censure des reportages et à permettre aux médias d’informer le monde sur le conflit au nord du Niger. »

Ce mercredi, RFI diffusait l’interview d’un ancien officier de l’armée devenu rebelle, Kindo Zada. Le jour suivant, elle était suspendue pour un mois par le Conseil Supérieur de la Communication du Niger.

Daouda Diallo, président du conseil, a accusé RFI d’avoir présenté Zada comme un « déserteur de l’armée », l’appelant « criminel fugitif ». Zada avait été emprisonné et radié de l’armée en 2002 suite à une affaire d’enlèvement. Il reste cependant populaire dans les rangs de l’armée. Des reporters sur place pensent que le conseil tente actuellement d’empêcher des désertions supplémentaires, en bloquant les reportages de la station sur Zada et la rébellion elle-même.

Il y a une semaine, le chef de l’armée en voulait à RFI pour ses reportages sur la rébellion. Un général de l’armée, Moumouni Boureïma, a menacé un correspondant de RFI, Moussa Kaka, durant une réception à l’ambassade française de la capitale Niamey, selon des bulletins d’informations. Boureïma a été cité, mettant en garde Kaka, « Toi, un de ces quatre matins, je vais te tuer ».

Kaka a réalisé des interviews exclusives des leaders rebelles, et fait des photos qui ont été reprises dans plusieurs journaux à Niamey, ont déclaré des journalistes locaux au CPJ. Egalement directeur de la station privée Radio Saraounya FM, Kaka a couvert l’agitation dans le nord du pays ces 15 dernières années, et fut le seul journaliste à rapporter l’actualité depuis cette zone, a déclaré Boubacar Diallo, président de l’Association Nigérienne des Editeurs de la Presse Indépendante (ANEPI), au CPJ.

Ce n’était pas la première fois que Kaka était harcelé pour son travail. En 2004, il a été emprisonné quatre jours suite à une interview qu’il avait faite avec un leader touareg rebelle.

Dans une déclaration officielle obtenue par le CPJ, RFI a protesté contre cette décision, affirmant que ses reportages étaient justes et impartiaux. RFI émettait en français et hausa, langue la plus largement parlée au Niger.

RFI a été le second média suspendu ce mois à cause de ses reportages couvrant le conflit meurtrier. Le 29 juin, les autorités avaient déjà suspendu le bimensuel Aïr Info pour trois mois. Elles avaient également mis en garde plusieurs autres journaux contre d’éventuelles sanctions.