New York, le 10 mai 2007—Le Comité pour la Protection des Journalistes est préoccupé par la détention depuis dimanche du directeur de publication d’un journal privé de la capitale Kinshasa. En effet, un journaliste a été interpellé après avoir tenté de recueillir des commentaires d’un fonctionnaire municipal. Or la semaine dernière, le CPJ a classé la République Démocratique du Congo parmi les pays les plus rétrogrades en matière de liberté de la presse.
Jean-Pierre Phambu Lutete du journal bihebdomadaire La Tolérance, a été arrêté par la police alors qu’il allait interviewer Pauline Ipelueka, une responsable de l’administration foncière de Kinshasa, à propos d’une affaire criminelle la concernant, selon des journalistes locaux. Sylvain Kayumba, un avocat de l’Observatoire des Media Congolais (ODM), organe autorégulateur des média, a affirmé que madame Ipelueka avait averti la police après qu’une personne, qui s’était fait passer pour un faux intermédiaire, lui aurait révéler que monsieur Lutete avait l’intention de la faire chanter.
Madame Ipelueka est depuis revenue sur sa plainte, mais le journaliste est resté en prison, toujours accusé de « menaces et tentatives d’extorsion », a annoncé l’avocat au CPJ. Le défenseur de Luette, Maître Kayumba, travaille avec l’ODM. L’ODM a condamné l’arrestation du journaliste et a adressé une lettre de protestation au procureur de la république, son président Polydor Muboyayi a confié au CPJ.
« Nous sommes profondément indignés par la détention de Jean-Pierre Phambu Lutete. Son arrestation confirme les tendances d’emprisonnement et de harcèlement judiciaire envers les journalistes, documentées par le CPJ durant ces dernières années », a déclaré Joël Simon, le directeur exécutif du CPJ. « Nous demandons aux autorités de rejeter ces chefs d’inculpation qui sont sans fondement, et la remise en liberté immédiate de Lutete ».
L’arrestation de Lutete survient peu après la Journée Internationale de la Liberté de la Presse, le 3 mai. Marquant ce jour, le Ministre de l’Information, Toussaint Tshilombo, a déclaré que la liberté de la presse était « respectée » en République Démocratique du Congo, selon la radio privée Okapi. La station a repris les propos de Tshilombo, déclarant qu’un seul journaliste avait été incarcéré dans le pays, pour des raisons non professionnelles depuis la prise de pouvoir du nouveau gouvernement, le 24 février.
Mais depuis le changement de gouvernement, les enquêtes menées par le CPJ démontrent que les autorités ont condamné un journaliste à la prison; occupé et mis à sac les stations de radiotélévision du leader de l’opposition Jean-Pierre Bemba; attaqué trois stations de radio de province; et détenu un journaliste radio pendant deux jours suite à des reportages critiquant les autorités.
Par ailleurs, c’est la troisième fois en deux ans que Lutete a été incarcéré pour avoir fait son travail, selon les recherches l’enquête du CPJ. Il a été emprisonné pendant trois semaines en 2005, et un mois en 2006 pour avoir écrit des articles critiques a l’égard du gouvernement.