In the year marking the 50th anniversary of Togo’s independence, the Togolese press is suffering from an obvious malaise—a malaise perceived by the informed citizen and not by communications professionals themselves. This malaise transpires in the daily practice of journalism through the lack of professionalism. If elsewhere the media is stifled under the heel of power, in Togo, the state, in its “complicit neutrality,” watches the press drift below minimum journalistic ethics where the crosschecking of information before its dissemination is wanting.
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Statistics are flattering (86 radio stations, three dailies, 60 publications and nine television stations). But the scourge in the Togolese press is the absence of professional rigor. Of all these media outlets, only 2-3 percent of the workforce has undergone a certified training course. I once bragged to a foreign journalist friend about the number of radio stations (19) in Lomé. His response was unequivocal: “They only air sound.” A paradox. The reasons for this lack of training are manifold and indicative of the amateurism in the media. In a workshop, an editor countered: “You require us to show professionalism, but the fact is that the mediocre who do sensational reporting cope pretty well financially.”
When in July 1975, following my training at the School of Journalism of Lille, France, I began my career as editor-in-chief and newscaster for Togolese Television, which had been founded two years earlier. Some colleagues like Léopold Ayivi were our idols from Radio Lomé and their presence on television proved to be both reassuring and impressive. We were afraid of “making mistakes in the presence of the masters.” Today, the younger generation seems to trivialize the daily practice of the profession, especially in the broadcasting sector. They forget that the credibility and competence of a media professional is challenged every day and that you must outdo yourself with each new assignment.
When researchers analyze the state of the Togolese press 50 years after Independence, they will certainly report three phases: The 1960-1989 phase, under the seal of rigor, training, and professionalism. The 1990-2000 phase, when the militant press appeared more oriented toward sensationalism and bashing—tt nevertheless played a role in the conquest of democracy. The third phase, in 2000-2010, that of malaise illustrated by the “in-house” journalism of corrupt editors and corrupt manipulators of the press. It is also the era of business-savvy media owners more concerned about profits than information. A matter of survival.
In 1975, one had to learn the subtleties of the profession according to the editorial line of the single party. For this reason, I decided to go to the national daily Togo Presse to see how information was handled in accordance with the party line. The party censors were zealous. Once, I was accused of lacking activism because a cameraman did not record footage of onlookers perched on trees in the streets of Niamey, Niger’s capital, while the motorcade of visiting President Gnassingbe Eyadema passed. At that time, presidential trips were moments of great pressure. We had to record all that was happening around the traveling head of state. Not an easy task, given the weight and bulk of the equipment used at the time. A journalist was at the same time a reporter, an assistant cameraman, and a “carrier” of boxes of film weighing 30 to 40 pounds (15 to 20 kilograms).
At the liberalization of the media space in 1989, the pioneers missed the chance to overlay onto the Togolese press an imprint of professionalism. Could they have achieved it without professionals? The collaborators followed in an unconscious imitation. The public, eager for sensational reporting, turned away from state-owned media, synonymous with the voice of the “dictatorship” to fight. On the other side, sat enthroned the so-called private media, that of the message bearers of freedom and democracy. Hard today to straighten up a branch now 20 years old. It is therefore necessary to prune it for new buds.
The Togolese institutional framework is conducive to the emergence of a credible press in the country. If the state cannot afford to initiate training, media associations should, in a lucid approach, create conditions conducive to training. A share of the media support fund granted by the state could be allocated to it. We should overcome egos and work for the benefit of the entire profession. Today, though media actors are reveling in mediocrity, the emergence of ICT impose a tough selection where only the ones who best fit into this new professional environment will be chosen.
Latévi Ebénézer Lawson is the Coordinator of the Lomé-based CFPC (Communication Training School).
CPJ is running a series of blog entries to celebrate the 50th anniversary of the end of colonial rule in Francophone Africa.
Au Togo, la presse souffre d’un malaise 50 ans après l’indépendance
La presse togolaise aujourd’hui en cette année du cinquantenaire de l’indépendance du Togo est minée par un malaise évident—un malaise perçu par le citoyen averti et pas par les acteurs de la communication eux même. Un malaise qui transparait dans l’exercice quotidien du métier : l’absence de professionnalisme. Si ailleurs la presse étouffe sous la botte du pouvoir, au Togo l’Etat dans une « neutralité complice » observe la dérive journalistique où le minimum de déontologie, la vérification des informations avant diffusion, fait défaut.
Les statistiques sont flatteuses (86 radios, 3 quotidiens, 60 publications et 9 télévisions) mais le contenu pêche par l’absence de rigueur professionnelle. Dans l’ensemble de ces média réunis, seuls 2 à 3% de l’effectif peuvent prétendre disposer d’une attestation de formation. A un ami journaliste étranger à qui je vantais le nombre de radios (19) à Lomé, sa réponse fut sans appel : « il n’y a que du son ». Paradoxe. Les raisons de cette carence sont multiples. Elles justifient l’amateurisme. A un atelier un directeur de publication réplique « vous nous demandez le professionnalisme, mais le constat est que, ceux qui sont médiocres et font du sensationnel s’en sortent bien financièrement ».
Quand, en juillet 1975, après ma formation a l’Ecole Supérieure de Journalisme de Lille, je commence ma vie professionnelle en tant que Rédacteur en chef et présentateur du journal de la télévision togolaise, la chaine avait juste deux années d’existence. Certains collègues comme Léopold AYIVI étaient nos idoles de Radio Lomé et leur présence à la télévision s’avérait à la fois sécurisante et impressionnante. Nous avions la peur de « faire la faute devant le maître ». Aujourd’hui la jeune génération semble banaliser l’exercice quotidien du métier surtout dans l’audio-visuel (émission sans conducteur) et oublie que chaque jour est une remise en cause de sa crédibilité de sa compétence. Et qu’il faut se surpasser à chaque nouvelle prestation.
Quand les chercheurs analyseront l’état de la presse togolaise cinquante ans après l’indépendance, l’observation relèvera certainement trois étapes. L’étape 1960 – 1989 marquée du sceau de la rigueur, de la formation et du professionnalisme. La période 1990 – 2000 où apparait la presse de combat plus orientée vers le sensationnel et le défoulement. Elle jouera tout de même son rôle dans la conquête de la démocratie. La troisième phase 2000 – 2010 celle du malaise illustrée par un journalisme « maison » de rédacteurs corrompus et de corrupteurs manipulateurs de la presse. Celle aussi de certains patrons de presse « épiciers » plus orientés vers le profit que vers l’information. Une question de survie.
En 1975, il fallait apprendre les subtilités de l’exercice du métier selon la ligne éditoriale du parti unique. C’est pour cette raison que j’avais décidé de me rendre au quotidien national Togo Presse pour voir comment l’information était traitée dans la ligne du parti. Il s’est avéré que l’on pouvait appliquer les règles du métier aux options du parti et le tour est joué. Mais il y avait les censeurs de parti, des zélés. Une fois j’ai été accusé d’absence de militantisme parce que le cameraman n’avait pas enregistré les images de spectateurs perchés sur les arbres dans les rues de Niamey au passage du cortège du Président Eyadema en visite au Niger. Les voyages présidentiels de l’époque étaient des moments de grandes tensions. Il fallait faire la moisson de tout ce qui se passait autour du chef de l’Etat. Pas facile, face au poids et à l’encombrement du matériel de l’époque. Le journaliste était à la fois reporter, assistant cameraman et « porteur » des boites de pellicule (15 à 20 kg).
En 1989, à la libéralisation de l’espace médiatique, les pionniers ont raté le coche, celui d’imprimer à la presse togolaise l’empreinte du professionnalisme. Pouvaient-ils le réaliser sans hommes de métier ? Les collaborateurs ont suivi dans un mimétisme naïf. Le public, avide de sensationnel s’est détourné des média d’Etat synonymes de porte voix de la “ dictature“ à combattre. En face trônait la presse dite privée celle des porteurs du message de liberté et de démocratie. Difficile de redresser aujourd’hui une branche vieille de 20 ans. Il va falloir tailler pour de nouveaux bourgeons.
Le cadre institutionnel togolais est propice à l’émergence d’une presse crédible au Togo. Si l’Etat ne peut se permettre d’initier la formation, les associations des média devraient dans une approche lucide créer les conditions propices à la formation. Une part de l’aide à la Presse de l’Etat pourrait y être allouée. Dépasser les égoïsmes et œuvrer pour l’ensemble de la corporation. Si aujourd’hui les acteurs se complaisent dans cette médiocrité, l’émergence des NTIC va opérer une rude sélection ou seuls les meilleurs aptes à s’insérer dans ce nouvel environnement professionnel seront les élus.
Latévi Ebénézer LAWSON est le Coordonateur du Centre de Formation Pratique en Communication (CFPC).